Spoilers !
Classique absolu de la littérature de SF, Le Meilleur Des Mondes est un roman d'Aldous Huxley (essentiellement un philosophe et essayiste), paru dans les années 30, et qui pose la question du futur de la race humaine. Dans ce roman, on est dans un futur plus ou moins éloigné, et les Hommes ne naissent plus, ils sont conçus in vitro. Jusqu'à ce qu'un homme, surnommé le Sauvage, fasse son apparition, un homme sur lequel plane une atroce rumeur : il serait né d'une mère, à l'ancienne. Ce roman majeur n'a jamais été réellement adapté au cinéma tel quel, mais, en 1997, Andrew Niccol (futur réalisateur du génial Lord Of War) a réalisé un film qui, bien que ne citant pas le roman de Huxley dans son générique, s'en inspire très fortement : Bienvenue A Gattaca. Le film, devenu lui aussi un gros classique de la science-fiction, est interprété par Ethan Hawke, Uma Thurman, Jude Law et Alan Arkin (Gore Vidal, Xander Berkeley, Loren Dean, Ernest Borgnine, Tony Shalhoub, Elias Koteas complètent la distribution du film). Il n'a pas obtenu beaucoup de succès à sa sortie (ça n'a pas été un bide retentissant non plus, disons un succès d'estime), mais il est devenu totalement culte par la suite, et il fête cette année ses 20 ans.
L'action se passe dans un futur pas trop éloigné, aucune date n'est cependant donnée. Quand aux lieux... Aux USA, très certainement, et sur la côte (plusieurs scènes se passent près de la mer), mais où exactement, on ne le saura pas. L'histoire est racontée, à la première personne, en voix-off, par le personnage joué par Ethan Hawke, Vincent Freeman (ce qui fait qu'on a au final peu d'inquiétude sur le personnage tout du long du film, même si un dénouement surprise peut toujours arriver ; je ne dirai pas comment ça se termine, ceci dit). Vincent est un jeune homme atteint d'une malformation cardiaque, a qui on a donné à peu près 30 ans d'espérance de vie à la naissance (dans ce futur, un simple échantillon sanguin, à la naissance, peut apporter plein d'informations sur le futur déroulé de la vie du bébé), et il a à peu près cet âge-là quand l'action démarre. Vincent est né à l'ancienne, sans manipulation génétique, tandis que son jeune frère Anton a, lui, été quelque peu 'bidouillé' avant sa naissance : dans ce futur, on peut choisir le génotype de ses futurs enfants, les sélectionner, virer les tares, défauts physiques, etc, et en quelque sorte, les 'programmer' avant leur naissance à accomplir de futres grandes choses (en faire des athlètes, des intellectuels). De l'eugénisme à grande échelle.
Le rêve de Vincent est d'incorporer Gattaca, un centre d'études spatiales organisant des voyages interstellaires d'étude. Vincent est depuis toujours passionné par l'espace. Mais il est un Invalide, il n'a pas été pré-sélectionné avant sa naissance (contrairement à son petit frère), et il possède un problème cardiaque latent, ce qui, donc, l'élimine totalement, il n'a aucune chance. Si un jour, il entre dans Gattaca, ça sera en tant que balayeur...et c'est justement ainsi qu'il finit par être embauché. Un coup du destin va faire qu'il va entrer en contact avec German (Tony Shalhoub), un 'trafiquant' d'ADN qui va l'aider à accomplir son rêve, et faire de lui un 'dé-gêne-éré', un faux Valide : il va mélanger l'ADN d'un Valide champion, Jerome Morrow (Jude Law) avec le sien, avec l'accord de Morrow. Ce dernier est dans un fauteuil roulant suite à un accident qui est resté secret, personne ne sait qu'il est désormais impotent. Morrow lui fournit des échantillons ADN (urine, sang, salive, cheveux) à demande, et lui cède son identité. Vincent devient Jerome, avec une nouvelle coupe de cheveux, le port de lentilles de vue et même une opération orthopédique le faisant grandir de 5 centimètres. Grâce à ça, il devient un Valide, et incorpore le programme spatial de Gattaca, où il fera la connaissance d'Irène (Uma Thurman), une jeune femme d'apparence assez froide mais que Vincent/Jerome ne semble pas laisser indifférente (et c'est réciproque). Tout va bien jusqu'à ce qu'un jour, le directeur du service où travaillent Vincent/Jerome et Irène soit retrouvé assassiné. Bien qu'innocent du crime, Vincent comprend vite que les multiples enquêtes et tests ADN de la police risquent fort de lui jouer un sale tour...
Comme je l'ai dit, le film ressemble beaucoup, par moments, au roman de Huxley, suffisamment pour que je prenne la liberté de mettre le tag 'adaptation de roman' alors que ça n'en est pas un, en réalité. Le film ne possède, selon moi, qu'un seul défaut : sa durée. Non pas qu'il soit trop long, au contraire : avec 100 petites minutes (générique de fin compris) au compteur, Bienvenue A Gattaca (Gattaca pour son titre original) est au contraire trop court. En même temps, on n'a pas le temps de se faire chier en le regardant, ce film, ce n'est pas comme s'il durait 3 heures, mais je pense quand même que 100 minutes, c'est vraiment peu. Ca va parfois un peu vite, j'ai l'impression que le dénouement du film est un peu expédié. Autre chose à dire au sujet du film, c'est sa froideur, sa rudesse ; pas ou peu d'humour, ici, et on a l'impression, voulue très certainement, qu'il a été conçu en laboratoire, dans des éprouvettes (ce qui n'est pas très éloigné du sujet du film !), tant il semble clinique, impersonnel, froid, un peu comme les personnages du film (le personnage principal excepté) et l'essentiel des décors (bétonneux, vitrés, froids). Comme je l'ai dit, c'est très probablement volontaire.
Tourné en partie dans les décors ayant servi pour le film THX 1138 de George Lucas (1971), utilisant notamment des véhicules très récents (au moment de la sortie du film) pour accentuer son côté futuriste, Bienvenue A Gattaca est un thriller génétique sur l'identité, et une pure merveille de SF. Premier film réalisé par Niccol, il ne sera pas un succès commercial à sa sortie (il deviendra culte par la suite), mais aura en revanche obtenu de très bonnes critiques de la presse. Les acteurs sont absolument excellents, mention spéciale à Jude Law, excellent en Valide coincé dans un fauteuil, à la fois aigri et plein de bonne volonté pour faire en sorte que celui qui va prendre son nom et son ADN réussisse son rêve (il ne fait pas ça gratuitement, ceci dit). Ethan Hawke et Uma Thurman sont excellents aussi, un peu froids ceci étant, comme le film dans son ensemble. Gattaca (le titre est une allusion aux séquences ADN : les lettres G, A, T et C, qui sont mises en surbrillance dans le générique de début, sont en effet les quatre composantes - ou plutôt, leurs initiales - de l'ADN) semble avoir été cultivé dans une éprouvette pour en éliminer le moindre défaut (sa courte durée excepté). Ethan Hawke conserve quasiment tout du long son visage quelque peu lisse, sans vraiment d'expression, et on peut dire la même chose d'Uma Thurman, irréellement parfaite d'un point de vue physique, comme une poupée qui bouge. Mais avec un regard, souvent, mort. Tout ceci en rajoute à l'aspect froid et austère de ce classique de la SF !