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Spoilers !

Dernier film, aux USA, à être sorti en format LaserDisc (pour l'anecdote inutile ne servant qu'à lancer l'article), A Tombeau Ouvert est sorti en 1999 et est aussi, donc, le dernier film de Martin Scorsese pour la décennie 90, décennie au cours de laquelle il nous a régalés avec Les Affranchis, Les Nerfs A Vif et Casino, mais aussi offer  son film le moins scorsesien, Kundun. Adapté d'un roman de Joe Connelly, A Tombeau Ouvert (Bringing Out The Dead, titre original que je trouve nettement plus frappant) est un des premiers DVD que je me sois payés, avec Le Monde Ne Suffit Pas, Black Rain, Fight Club et Il Faut Sauver Le Soldat Ryan (que du bon, donc, sauf le premier film cité, mais je suis fan de James Bond, alors...). J'avais acheté le DVD (que je ne suis plus sûr de posséder) sur la foi du nom de Scorsese, mais je me souviens avoir quand même assez rapidement déchanté en regardant le film. Ceci dit, les visionnages suivants ont été nettement meilleurs. Je ne crierai jamais que le film est un des meilleurs du réalisateur de Taxi Driver et de Raging Bull (à ce titre, au fait, le vrai raging bull, Jake La Motta, est mort récemment, autre anecdote inutile par rapport au film que j'aborde aujourd'hui, mais RIP), mais en revanche, il s'agit d'une des meilleures prestations de Nicolas Cage, acteur qui, il faut bien le dire, par le biais de choix artistiques des plus douteux (remake de The Wicker Man, notamment, mais aussi les Benjamin Gates, Ghost Rider, World Trade Center) depuis les années 2000, s'est fait une spécialité d'enchaîner merde sur merde et de devenir complètement ringard et nanardesque. 

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J'ose le dire, oui, j'ose le dire : A Tombeau Ouvert est, avec Lord Of War d'Andrew Niccoll en 2005 (et dans une moindre mesure, et entre ces deux films, Windtalkers de John Woo en 2002), le dernier grand rôle de Nicolas Cage, passé désormais par profits et pertes. C'est la première, et probablement dernière, collaboration entre Scorsese et cet acteur. Comme je l'ai dit, le film adapte un roman de Joe Connelly, et le scénario du film est signé Paul Schrader, lequel avait déjà collaboré avec Scorsese via les scénarii de Taxi Driver, Raging Bull et La Dernière Tentation Du Christ. La musique du film est signée du grand Elmer Bernstein, mais on y entend pas mal de rock (une constante chez Scorsese), comme The Clash, Johnny Thunders, REM, Van Morrison, Jane's Addiction, The Who, sans oublier aussi de la pop (Martha & The Vandellas, UB40), de la soul (Stevie Wonder), de la chanson (Frank Sinatra), du reggae (The Melodians, Burning Spear) et de la musique classique (Stravinski). Interdit aux moins de 12 ans à sa sortie, le film est également interprété par Ving Rhames, John Goodman, Patricia Arquette, Marc Anthony, Tom Sizemore, Cliff Curtis, Mary Beth Hurt et Aida Turturro.

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Se passant intégralement de nuit (ce qui en dit long sur son atmosphère, lugubre, sombre, poisseuse, sans espoir), le film n'est absolument pas une comédie. Ce n'est pas un polar, ni un film de suspense non plus. En fait, A Tombeau Ouvert est un film difficilement classable : drame, chronique de la folie, et même un peu film fantastique quelque part, c'est tout ça. Le film se passe à New York, à Manhattan, dans les quartiers de Hell's Kitchen, Greenwich Village, Norfolk Street et Midtown, et les personnages principaux ne sont ni des flics, ni des truands, mais des ambulanciers, travaillant de nuit, pour l'hôpital Our Lady Of Perpetual Mercy. Frank Pierce (Nicolas Cage) et ses collègues Marcus (Ving Rhames), Larry (John Goodman) et Tom (Tom Sizemore), arpentent les rues new-yorkaises de leur secteur, ramassant les malades, blessés, fous, sans-abris, overdosés, paumés en tous genres. Carburant aux amphétamines pour tenir le coup, Frank est d'un tempérament dépressif et las de la vie, il n'a réussi à sauver la vie de personne depuis un certain temps, et commence à voir les fantômes des gens qu'il n'a pas pu sauver, un peu partout. Il se sent au bord de la folie. 

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Une nuit, après avoir embarqué un vieil homme victime d'un arrêt cardiaque, Frank sympathise avec Mary (Patricia Arquette), sa fille, une femme ayant eu dans le passé de lours problèmes de drogue et qui, comme lui, semble être perpétuellement sur le fil, au bord du gouffre. Frank découvre que Mary connaît bien (c'est un ami d'enfance) Noel (Marc Anthony), un homme au cerveau malade, rongé par la drogue, délinquant imprévisible que Frank et ses collègues ramassent souvent pour l'embarquer, pour la nuit, à l'hôpital. Une autre nuit, en compagnie de Marcus, très religieux, Frank aide deux jeunes gens d'origine portoricaine, la jeune femme est enceinte, mais clame que tous deux sont vierges. L'accouchement se passe, mais le bébé meurt, ce qui entraîne une cuite mémorable de Frank et Marcus, qui envoient, suite à ça, l'ambulance dans le décor (heureusement, ils ne transportaient personne d'autre qu'eux-mêmes). Le lendemain, en compagnie de Mary, il expérimente la drogue...

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Plus une série de vignettes qu'un film racontant une histoire, A Tombeau Ouvert se passe en plusieurs nuits, au fil des pérégrinations de Frank et de ses très différents collègues : Ving Rhames joue un homme très religieux, Tom Sizemore un homme violent et imprévisible, et John Goodman est, lui, très 'normal' par rapport aux autres. L'ambiance générale, bien que parfois contrebalancée par des chansons rock ou pop plutôt légères ("What's The Frequency, Kenneth ?" de REM, "Red Red Wine de UB40, "Janie Jones" des Clash...), est totalement oppressante, sombre, allume-gaz même, il est déconseillé de regarder ce film si vous avez le moral à zéro, car ça ne vous aidera vraiment pas à remonter la pente (si vous êtes un habitué, pour des raisons personnelles, des hôpitaux, il vaut mieux, aussi, éviter de regarder ce film qui peut rappeler de mauvais souvenirs). Très réaliste par moments, totalement irréaliste dans d'autres, et multipliant les allusions religieuses (les deux jeunes Portoricains, parents mais pourtant se disant vierges, s'appellent Jesus et Maria ; un dealer, à un moment donné, est retrouvé crucifié ; la scène finale fait penser à une Pieta), Bringing Out The Dead est un film envoûtant mais parfois maladroit, remarquablement interprété, sobrement réalisé, mais dont le scénario est parfois décousu. Ce n'est pas le meilleur film de Scorsese, mais il possède une atmosphère ahurissante de fin des temps et de rédemption, et au final, il n'y avait vraiment que Big Marty pour le réaliser. Et j'insiste encore une fois, en guise de conclusion : Nicolas Cage est juste impressionnant dans ce film, ce qui est au final assez rare pour être signalé !