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Spoilers, révélations sur l'intrigue...

David Fincher a pour ainsi dire tout réussi dans sa carrière de réalisateur. Il a en effet démarré en fanfare avec Alien 3, film incroyable et sous-estimé, qui avait le mérite d'achever en beauté une trilogie (qui, pourtant, est devenue une quadrilogie avec Alien, La Résurrection en 1997, ce qui ne s'imposait pas, merci Jean-Pierre Jeunet) et d'en proposer une vision terriblement sombre (les producteurs ayant remonté le film en proposant une autre fin, Fincher a renié Alien 3). Ce côté sombre ne lâchera pas de sitôt Fincher : Seven (1995), son film suivant, est un chef d'oeuvre du thriller, le meilleur film du genre probablement, et un film terrifiant et tellement sombre et dépressif (tout se passe sous une pluie battante, sauf le final, ensoleillé, mais d'une noirceur absolue) qu'il est à déconseiller aux âmes sensibles. En 1997, The Game, avec Michael Douglas et Sean Penn, film labyrinthique, est probablement le moins réussi du réalisateur, ou un de ses moins réussis. 1999 : l'échec commercial de Fight Club (un grand film anarchiste et violent) cause presque sa perte, déjà que The Game n'avait pas super bien marché... Puis arrive Panic Room en 2002, premier film de Fincher que j'ai vu en salles. Un film de commande, techniquement irréprochable, mais scénaristiquement limité, pas mal, mais sans plus. Zodiac, fait en 2007, nous fait revenir Fincher en grande forme. Ce que L'Etrange Histoire De Benjamin Button, en 2008, confirmera, le film étant monumental bien qu'un peu trop long. The Social Network, en 2010, m'a royalement emmerdé (je trouve de toute façon que Facebook est un site de merde, voilà, c'est dit), et le remake de Millenium qu'il a fait en 2011 est inutile. En 2013, Fincher se lance dans la télévision, via la série House Of Cards. La même année, l'adaptation en BD - en fait, un roman graphique - du roman Le Dahlia Noir d'Ellroy, scénarisée par Fincher, sort. 

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Et en 2014 sort ce qui reste, à ce jour, le dernier film de David Fincher (en attendant le suivant, pas encore annoncé) : Gone Girl. Adapté d'un roman de Gillian Flynn (Les Apparences), qu'elle a elle-même adapté en scénario, le film est interprété par Ben Affleck (non ! ne vous sauvez pas ! REVENEEEEEEZ !), Rosamund Pike, Neil Patrick Harris, Tyler Perry, Patrick Fugit, Carrie Coon, Kim Dickens, Emily Ratajkowski, Missi Pyle et Casey Wilson, notamment. La musique du film, étrange, atmosphérique, inquiétante et relaxante en même temps, et qui colle parfaitement, est signée Trent Reznor (leader de Nine Inch Nails) et Atticus Ross (une sorte de Reznor britannique). Le film est assez long (2h30) et possède une intrigue tellement tarabiscotée et remplie de détails et de rebondissements que pour le résumé, j'hésite entre deux façons de faire : tout raconter (de toute façon, il y à la mention 'spoilers' en haut d'article, ceux qui n'ont pas vu le film et ne veulent rien savoir devraient aller lire un autre article du blog en attendant d'avoir vu Gone Girl) en essayant quand même de ne pas m'empêtrer dans les détails, ou bien rester flou, vague, ne m'en tenir qu'au postulat de base, et ne rien révéler d'important sur les tenants et aboutissants de l'intrigue. Ce  qui serait sympa pour les ceusses n'ayant pas vu le film, mais assez paresseux de ma part, compte tenu que le postulat de base tient en une ligne : une femme disparaît et son mari, qui ne semble pas plus perturbé que ça par sa disparition, est accusé de l'avoir tuée, et doit s'en défendre. 

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Je vais essayer de dire un peu plus. L'action se passe dans une petite ville du Missouri. Nicholas 'Nick' Dunne (Ben Affleck) et son épouse Amy (Rosamund Pike) y habitent depuis environ 2 ans, ayant quitté New York et sa vie de dingues pour y mener une vie plus calme. Le jour de leur cinquième anniversaire de mariage, Nick se réveille, ne trouve pas sa femme près de lui, et dans le salon, la table est pulvérisée, en miettes. La police s'en mêle, disparition inquiétante, tout ça, et une conférence de presse est organisée, au cours de laquelle Nick ne parvient pas à paraître tel qu'il devrait être. Normalement, il devrait jouer le rôle du mari éploré, inquiet, mais il semble au contraire détaché, comme s'il n'en avait rien à foutre. Leurs relations commençaient à se dégrader, le couple battait de l'aile, et ça plus le comportement froid, distant de Nick font que la police commence à le suspecter (surtout qu'on retrouve du sang, au luminol, dans le salon), et que l'opinion publique (relayée en cela par des journalistes hargneux contre lui, et surtout Ellen Abbott (Missi Pyle), qui ne semble pas connaître le principe de présomption d'innocence et accuse carrément Nick de meurtre) se retourne contre lui, le considérant comme le tueur de sa femme, la si épatante Amy.

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Menant sa petite enquête en solo, Nick retrouve deux anciennes liaisons d'Amy : Tommy O'Hara, qui lui révèle qu'Amy est une femme machavélique, cruelle, froide, qui n'a pas hésité à créer de fausses preuves pour faire accuser Tommy de l'avoir violée. Ce qui fait qu'il est désormais catalogué comme délinquant sexuel, et mis au ban de la société. Nick retrouve aussi Desi Collings (Neil Patrick Harris), un riche héritier qui a très mal vécu leur rupture, a été quelque peu insistant auprès d'Amy, qui n'a pas hésité à porter plainte contre lui afin d'obtenir à son encontre une ordonnance restrictive, il ne pouvait plus s'approcher d'elle. Il ne peut pas se douter qu'Amy, bien vivante, et vivant dans un camping (avant d'être recueillie par Desi, qui la cachera chez lui), a tout fait pour qu'on la croie morte, ayant organisé son faux assassinat en répandant son propre sang et en le nettoyant pour qu'on ne le découvre pas immédiatement. Elle a fait ça pour se venger du comportement de Nick depuis quelques temps, il est devenu froid, différent, et surtout, elle le sait, infidèle. Amy a dressé un piège autour de son mari pour le punir, mais le piège va aller plus loin encore...

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Gone Girl est un thriller redoutable et efficace, doté d'une ambiance froide et impalpable et de scènes parfois assez dures. Les acteurs sont juste incroyables, mention spéciale à Ben Affleck (je n'aurai jamais cru écrire ça un jour) qui est vraiment bluffant dans le rôle de Nick. Lui qui est d'habitude aussi expressif qu'une poêle à frire de contrebande est ici parfait dans le rôle, car, justement, il est assez peu expressif, comme son personnage se doit de l'être. Il est aussi assez mystérieux, même inquiétant. Il m'a fait penser un peu à Bill Pullman dans Lost Highway de David Lynch et le film fait penser un peu à une autre création lynchienne, Twin Peaks. Rosamund Pike est excellentissime dans le rôle d'Amy, personnage lynchien aussi, hitchcockien. Comme je l'ai dit plus haut, la musique de Reznor et Ross fonctionne parfaitement avec le film, et la réalisation de Fincher est classieuse et efficace. Bref, Gone Girl, c'est du grand Fincher, son meilleur film depuis L'Etrange Histoire De Benjamin Button. Je précise aussi que le film est supérieur au roman de Gillian Flynn (qui fut un gros succès de librairie et est un excellent thriller), et qu'un second visionnage, même en sachant tout de l'intrigue, fonctionne très bien, ce qui est la preuve (s'il en fallait une) que ce film est une réussite dans son genre !