Spoilers...
Dans la lignée de Rosemary's Baby (1968), le cinéma hollywoodien a produit moult films qui surfaient sur le thème du démoniaque, du satanisme, du Diable, de la possession : L'Exorciste de Friedkin, La Malédiction de Donner, La Sentinelle Des Maudits de Winner... Avant ces trois films-là (qui datent respectivement de 1973, 1976 et 1977), il y à eu un film nettement moins connu (déjà, celui de Winner est moins connu que les autres que j'ai cités), sorti en 1971 sous un titre français des plus idiots et racoleurs : Satan Mon Amour. Son titre original est une allusion à un morcau de musique classique (de Liszt) que l'on entend dans le film : The Mephisto Waltz. Ce film est réalisé par Paul Wendkos, un tâcheron ayant touché à peu près à tout : séries TV (surtout), TVfilms, westerns (il a signé une des suites, minables, du classique Les 7 Mercenaires de Sturges). N'ayant pas obtenu beaucoup de succès à sa sortie, le film a acquis par la suite une réputation de film culte, et un paquet de fans en exigeront la sortie en DVD quasiment dès l'existence de ce format. Il existe depuis en DVD (il a été édité chez nous à deux reprises, la plus récente est chez Wild Side, visuel reprenant à peu près celui de l'affiche, racoleuse elle aussi), et si vous êtes intéressés par ce film, c'est probablement (avec Internet) la seule façon de le voir : avec son titre racoleur et douteux, il me semble improbable que ce film soit, un jour, programmé à la TV, sauf sur le satellite ou les chaînes internet !
Le film est interprété par Alan Alda, Jacqueline Bisset (ravissante, et même magnifique, comme toujours), Barbara Perkins, Curd Jürgens et on a aussi, dans des rôles secondaires, Bradford (crédité Brad) Dillman, Pamelyn Ferdyn (qui jouera, la même année, dans Les Proies de Siegel), Kathleen Widdoes et William Windom. Le film est adapté d'un roman de Fred Mustard Stewart, et bénéficie d'une musique inoubliable, souvent angoissante et dissonnante, du grand Jerry Goldsmith. Le titre français du film pourrait laisser penser à une histoire de secte sataniste à la Rosemary's Baby, et dans un sens...c'est le cas. C'est vraiment un titre douteux et ridicule, qui rendrait limite le film dangereux (comme si regarder un film dont le titre associerait le nom du Prince des Ténèbres à la notion d'amour serait dangereux pour la santé mentale) mais le film est juste assez angoissant par moments (sans toutefois atteindre les sommets de La Malédiction ou de Rosemary's Baby) et parle plus d'une histoire de possession que du Diable en lui-même.
Myles Clarkson (Alan Alda) est un pianiste amateur (sa vocation fut, à l'enfance, quelque peu contrariée et il abandonnera le piano dès lors) et surtout un journaliste spécialisé dans la musique. Il vit avec sa femme Paula (Jacqueline Bisset) et leur enfant Abby (Pamelyn Ferdyn), âgée d'environ 12 ans. Un jour, Myles reçoit un appel téléphonique de Duncan Ely (Curd Jürgens), un pianiste virtuose de renommée mondiale qui vit, dans sa luxueuse maison, avec sa fille adulte Roxanne (Barbara Perkins). Entre Myles et Ely (qui va le convaincre de se remettre au piano) une amitié va naître, amitié qui ne sera pas vraiment partagée par Paula, qui n'aime ni Ely ni surtout Roxanne (qu'elle soupçonne de vouloir séduire Myles, et qu'elle soupçonne aussi de coucher avec son père). Ely, qui est atteint de leucémie et n'en a plus pour longtemps, est, avec sa fille, sataniste (ils ne l'avouent évidemment pas à Myles ni a Paula).
Un soir, Ely fait venir Myles chez lui. Alors que Myles attend d'être reçu, Ely est à l'article de la mort, et invoque des prières satanistes dans son dernier souffle (tandis que Roxanne dessine un pentacle). Ely décède, est enterré, et à son enterrement, Roxanne déclame, en français dans le texte (tout comme la prière qu'Ely déclamera sur son lit de mort), une prière sataniste. Peu après, Paula remarquera de profonds changements dans le comportement de Myles : il devient un pianiste virtuose, l'égal d'Ely (et commence à se produire sur scène avec un succès grandissant), il commence à délaisser Paula et à s'intéresser de plus en plus à Roxanne, et surtout, il change de caractère, se met à ressembler de plus en plus à Ely (qui était du genre froid, calculateur, cruel). Paula va commencer à croire à l'impensable : Ely, avant de mourir, grâce à un pacte avec Satan, aurait transféré son âme dans le corps de Myles...
Malgré une esthétique (justement qualifié de proche de celle d'un soap-opera dans le descriptif du film au dos du boîtier DVD) ayant vieilli et un acteur principal (Alan Alda) franchement médiocre - en réalité, c'est Jacqueline Bisset l'actrice principale du film, elle a plus d'importance qu'Alda, et heureusement car elle ne joue pas mal), Satan Mon Amour - ce titre français, bordel à queue ! - est une assez bonne surprise, une série B plutôt angoissante, pas flippante non plus quand même, et flirtant avec un sujet qui, à l'époque, reviendra assez souvent dans le cinéma horrifique. Bien que n'apparaissant que dans la première partie du film, Curd Jürgens est assez inquiétant et son ombre rôde sur tout le film. Barbara Perkins est elle aussi assez inquiétante dans la manière dont elle interprète son personnage. Le film se paie le luxe de quelques scènes assez incroyables, comme celle de la soirée chez Ely, costumée, et qui démarre par la vision totalement LSDesque d'un chien à tête humaine. Pas un mec déguisé en chien sauf pour la tête, mais un vrai chien auquel on a placé une fausse tête humaine dessus, mais l'effet est si réussi qu'on se demande, au visionnage de ce plan, s'il est dans la réalité ou si on délire.
Le final du film est lui aussi incroyable dans son genre, et je ne le révèlerai évidemment pas, mais il est du genre vertigineux et totalement en raccord avec l'ambiance générale (assez poisseuse parfois) du film. The Mephisto Waltz (le titre original est une allusion à un morceau de musique classique, comme je l'ai dit, mais est à double sens, évidemment) est un efficace film d'angoisse donc, pas un sommet, il a ses défauts, il a vieilli, on trouve mieux dans le genre, mais c'est typiquement le genre de film qu'un amateur de cinéma horrifique appréciera de regarder de temps en temps. Une bonne série B parfaitement appréciable ! A noter que le film est interdit aux moins de 12 ans mais, malgré cela, ne contient que peu de scènes graphiques.