SPOILERS...
Come on Mary, don't fear the Reaper... C'est sur la magnifique et triste mélodie de la chanson (Don't Fear) The Reaper du groupe de hard-rock américain Blue Öyster Cult (chanson de 1976), chanson déjà citée en ouverture du roman dont il est l'adaptation, que ce TVfilm réalisé en 1994 s'ouvre. Ce TVfilm, long de six heures (quatre parties de 90 minutes chacune), c'est bien entendu l'adaptation du fameux roman de Stephen King Le Fléau (The Stand), roman datant de 1978 (et dont King publiera aussi une version étendue, définitive, en 1989). Un roman majeur, culte, essentiel à tout fan, et bien souvent considéré, par les fans, comme leur préféré (du moins, ceux qui ne préfère pas Ca, ce qui est par ailleurs mon cas, même si j'adore aussi Le Fléau). Scénarisé par King lui-même (qui se permet de jouer un petit rôle, Teddy Weizak, visible dès la troisième partie), le TVfilm, produit par CBS, sera diffusé en France par M6 (gros succès d'audience) en 1995, et est réalisé par Mick Garris, lequel avait, un an plus tôt, réalisé le film cinéma La Nuit Déchirée (Sleepwalkers), basé sur un scénario original de King (un gentil nanar horrifique et rigolo) et non pas sur une de ses nouvelles ou romans. Garris, ensuite, réalisera le remake télévisuel de Shining, puis d'autres adaptations en TVfilm : Désolation, Sac D'Os (encore inédit chez nous)...
Le Fléau est interprété par une foule d'acteurs, certains assez connus, d'autre franchement peu : Gary Sinise (Stuart Redman), Molly Ringwald (Frannie Goldsmith), Corin Nemec (Harold Lauder), Miguel Ferrer (Lloyd Henreid), Ruby Dee ('Mère' Abigaël Freemantle), Rob Lowe (Nick Andros), Laura San Giacomo (Nadine Cross), Jamey Sheridan (Randall Flagg, alias l'Homme Noir), Adam Storke (Larry Underwood), Bill Fagerbakke (Tom Cullen), Ray Walston (Glen Bateman), Matt Frewer (L'Ordure ; s'appelle La Poubelle dans le roman), Ossie Davis (le 'Juge' Richard Farris), Peter Van Norden (Ralph Brentner), Stephen King (Teddy Weizak), Shawnee Smith (Julie Lawry), et on notera les participations amicales et furtives de Kathy Bates (une animatrice radio), John Landis (Russ Dorr), Sam Raimi (Bobby Terry), Ed Harris (le général Starkey) et Kareem Abdul-Jabbar (le prédicateur fou dans les rues de New York). Comme on le voit, le casting aligne des pointures (Sinise, Ferrer, Lowe, Harris même si ce dernier n'apparaît pas longtemps) et des acteurs moins connus, mais que vous reconnaîtrez (des visages connus des amateurs de séries TV ou de Tvfilms), comme Laura San Giacomo, Ray Walston ou Matt Frewer. Quant à Ruby Dee, ce fut une actrice réputée dans les années 30/40, il me semble ! Les acteurs sont tous excellents (j'ai un problème avec Laura San Giacomo : pour dire les choses clairement, je n'aime pas sa tête, elle m'énerve ; mais dans son rôle, celui d'une femme trouble, en proie à de gros soucis intérieurs, elle excelle ici). Jamey Sheridan peut être un choix étonnant pour jouer l'Homme Noir, mais il est excellent aussi (King aurait bien vu Robert Duvall à la base, ou Eastwood, mais ce ne fut apparemment pas possible ; il ne regrette pas d'avoir opté pour Sheridan, ceci dit).
Je ne vais pas revenir en détail sur l'histoire : un virus de grippe mortel à 100% se propage aux USA (et dans le monde, même si l'action ne se situe qu'aux USA) suite à un accident dans une base scientifico-militaire américaine et à la fuite (il a eu peur et essayé de partir le plus loin possible) d'un de ses gardiens, Charles Campion, qui propage encore plus le virus. Des survivants, mystérieusement épargnés, immunisés, font, tous, des rêves étranges, soit sur une très vieille femme noire du Nebraska (Mère Abigaël), soit sur un homme mystérieux et quelque peu diabolique, l'Homme Noir. Progressivement, les survivants se réunissent, en deux clans : les 'bons' choisissent Mère Abigaël, et les 'mauvais', le camp de l'Homme Noir. Avec, apparemment, comme but, un ultime affrontement (titre original du roman : «L'Affrontement») entre le Bien et le Mal... Cette adaptation est dans l'ensemble très réussie, malgré des différences notables (le personnage du Kid, absent du roman dans sa première version, mais présent dans la version longue, manque ici, et le personnage de Nadine est en fait un mix entre deux personnages : Nadine (sans le personnage de Joe, enfant un peu sauvage qui, dans le TVfilm, est directement avec un autre personnage, Lucy Swan), et Rita, une femme rencontrée à New York par Larry, et qui n'accompagnera pas longtemps Larry, d'ailleurs). Il y à aussi le 'problème' du choix des acteurs : quelqu'un ayant lu le roman avant de voir le TVfilm n'aura pas imaginé Harold Lauder (plutôt grassouillet, physique ingrat et boutonneux, dans le roman ; boutonneux et physique anodin dans le film, mais corpulence normale, et avec lunettes) ou l'Homme Noir (plus comme Eastwood que comme Sheridan, acteur peu connu mais pas mauvais, dans le roman, selon moi) comme ils le sont dans le film. Perso, je me suis toujours imaginé Frannie blonde, cheveux longs, tout le contraire de Molly Ringwald qui l'interprète (brune, cheveux mi-longs) ! Aussi, dans le roman, Nick est, à un moment donné, traité de bamboula (terme péjoratif et raciste), ce qui signifierait qu'il serait Noir, mais rien ne le dit, en fait, dans le roman, j'imagine donc que ça doit être une erreur de traduction ; dans le film, Rob Lowe, qui interprète ce personnage de sourd-muet, est Blanc). Chacun imagine les personnages comme il le sent, après tout.
Mais ces différences (on notera aussi que la fin est un peu plus rapide que dans le roman) ne sont pas monstrueuses. Dans l'ensemble, Le Fléau est une excellente adaptation, qui va parfois droit à l'essentiel il est vrai, du roman du même nom. Un TVfilm ultra recommandé à tout fan de King ne l'ayant pas encore vu, malgré, cependant, des reproches à faire : visuellement, ça a vieilli. Non seulement c'est un TVfilm, ce qui signifie que le budget, tout en ayant été important pour le coup, n'était pas aussi important que pour un film cinéma de la même époque, mais en plus, ça date de 1994, bref, ça a 20 ans (déjà!). L'image est un peu granuleuse, les effets spéciaux (les transformations de Randall Flagg, peu nombreuses certes, mais il y en à quelques unes) sont datés. Certaines scènes, comme cette longue scène située vers le début du second épisode et montrant Mère Abigaël, seule, se parlant à elle-même (en fait, non : elle s'adresse à Dieu), ont vieilli ; cette fameuse scène, avec son décor moyen (ça se sent que ça a été tourné en studio, dans cette scène, les décors font pièce de théâtre de seconde zone) et son long monologue, est limite embarrassante au bout d'un moment ! Enfin, au rayon des reproches, la VF est parfois ratée (des voix ne correspondant pas trop au personnage, des intonations moyennes, etc), les voix françaises de Laura San Giacomo, Bill Fagerbakke (son personnage, Tom, est un attardé mental attachant ; était-ce utile, cependant, de lui filer une voix totalement débile et niaise ?) et Corin Nemec sont foirées. Celle de Jamey Sheridan n'est guère mieux, celle de Matt Frewer aussi. La VO, en revanche, rien à dire. Mais il faut toujours voir un film en VOST, c'est bien souvent (quasiment tout le temps, en fait) meilleur pour le jeu des acteurs. Après tout, en VOST, on entend leurs voix (sauf quand, pour une raison ou pour une autre, ils ont été overdubbés) !
Au final, malgré un aspect visuel un peu daté, Le Fléau est une excellente adaptation, certes longue (6 heures ! Mais il fallait bien ça pour adapter le roman), du roman du même nom. Acteurs très bons, scénario bien taillé, réalisation classique (Garris n'est pas un grand réalisateur, mais rien de honteux non plus), sens du suspense, tout est là pour faire de cette mini-série de quatre épisodes un bon moment, surtout pour les fans. Ca vous donnera sans doute aussi envie de lire le roman, si vous ne le connaissez pas encore. Ou de le relire. Ca existe en DVD (deux disques, avec deux épisodes par disque), bien souvent vendu à bas prix, alors n'hésitez plus ! Certes, ça a vieilli (un TVfilm de 20 ans...déjà qu'un TVfilm, à la base, vieillit moins bien qu'un film cinéma...), certes c'est long (regardez-le en plusieurs fois, pas d'un coup), certes la VF est à chier par moments, certes le roman est meilleur...mais c'est quand même franchement très bon. Je conseille, donc !