La saga James Bond 007 est mythique, c'est à l'heure actuelle, il me semble, la franchise cinématographique la plus longue parmi celles qui sont toujours en activité. Depuis 52 ans et le premier film, James Bond 007 Contre Docteur No (1962) ! Il y à eu de tout, à boire et à manger, dans la saga : les films avec Sean Connery (quasiment tous sont des chefs d'oeuvre, mis à part le premier qui possède cependant un grand charme kitsch de prototype imparfait, et Les Diamants Sont Eternels, de 1971, qui est un peu chabraque, mais fendard) ; le seul film, de 1969 (Au Service Secret De Sa Majesté), avec George Lazenby, acteur qui ne correspondait pas au rôle (Lazenby possède autant de charisme qu'un roman de Marc Lévy traduit en finnois et auquel il manquerait les pages 12, 165 et 217), mais le film, lui, est un des meilleurs, et pendant longtemps fut même LE meilleur, de la saga ; les films avec Roger Moore, dont certains sont grandioses et d'autres au final assez moyens, et qui, tous, sans exception, possèdent une ambiance assez légère, avec plein de gags visuels, de gadgets invraisemblables, de bad guys outranciers et d'allusions rigolotes ; les deux films avec Timothy Dalton, assez inégale période (le premier des deux films est médiocre, et l'autre, immense) et acteur trop sérieux et sombre pour le rôle, mais il se démerdait quand même bien ; et les films avec Pierce Brosnan, quatre au total, avec un bilan mitigé (un premier film génial, un deuxième correct, les deux autres ne valent, finalement, rien).
Puis, alors qu'on pensait la saga morte pour le compte après un Meurs Un Autre Jour (2002) infâme, on engage Daniel Craig, et Casino Royale (réalisé par Martin Campbell, déjà réalisateur de GoldenEye, premier des films avec Brosnan) sort en 2006. Surpuissant et novateur (et pas seulement parce que Craig est blond ; comme le personnage des romans de Ian Fleming, au passage), ce film est une bombe, le meilleur de la saga, mais il a, au départ, divisé les fans. Comment, James Bond qui jure comme un charretier (une première absolue dans la saga cinématographique), est blond, très sauvage et même jeune chien fou ? En plus, le film est un remake (en 1967, un film non-officiel et parodique avait déjà été fait à partir du roman Casino Royale, roman qui fut le premier de Ian Fleming avec le personnage de 007), et en plus d'en plus, on n'y entendait pas le fameux thème musical de 007 ni la fameuse phrasounette rituelle Bond, James Bond (sauf à la toute fin, dans les deux cas). Pire, pour certains fans, le film semblait totalement forgotter les autres films de la série, et faire comme si tout était à refaire, début d'une nouvelle franchise plutôt que 21ème film de celle-ci. Ce n'est pas un mal, ceci dit. Casino Royale apportait beaucoup de sang neuf, et, dans un sens, relançait la série. Deux ans plus tard, Marc Forster réalise Quantum Of Solace, qui est (et là aussi, ce fut une première) la suite directe du précédent opus. Le film est, il faut le dire, moins abouti que le précédent (il reste, aussi, vraiment bon), et marchera moins. On pensera, ensuite, à cause de soucis de production, de financement, la franchise morte. Queue n'hennit (ah ah ah), le 23ème 007 verra bien le jour, en 2012, sous la houlette de Sam Mendes. Toujours interprété par un Daniel Craig de plus en plus à l'aise, le film s'appelle Skyfall. Oui, c'est ce film (mal réveillés, les gars ?).
Le film est long : 2h15. Pas aussi long que Casino Royale et le film avec Lazenby, qui faisaient tous deux 2h25 (les plus longs de la saga), mais 2h15, c'est tout de même plus long que la majorité des autres films de la série, qui font environ 115/120 minutes chacun. Pour la troisième fois consécutive, la 007 Girl est jouée par une Française : après Eva Green et Olga Kurylenko (oui, elle est Française malgré son nom), place à Bérénice Marlohe, qui, il faut le dire, est sous-employée ici. Le méchant est joué par l'Espagnol Javier Bardem, et on retrouve Judi Dench dans le rôle de M, qu'elle tient depuis GoldenEye (et ce fut une petite révolution à l'époque : le premier M de sexe féminin !). On y trouve aussi Naomie Harris, Ralph Fiennes, Albert Finney, Roy Kinnear, Helen McCrory et Ben Whishaw dans le rôle d'un très jeune mais efficace Q. La musique est signée Thomas Newman, et la chanson du générique, portant le même nom que le titre du film (une première depuis Meurs Un Autre Jour), est interprétée par Adele et fut un succès monstrueux. Elle a même été élue, il me semble, meilleure chanson de générique d'un film de la saga, devant pourtant quelques réussites majeures comme Goldfinger de Shirley Bassey ou Live And Let Die des Wings. Quant au scénario du film, il a été écrit à huit mains : Neal Purvis, Robert Wade, Peter Morgan et John Logan, et il assure. A sa sortie, Skyfall a cartonné, et on a commencé à en parler comme du meilleur absolu de la série, meilleur que Casino Royale, Bons Baisers De Russie, Goldfinger et Au Service Secret De Sa Majesté réunis. Le plus drôle : c'est totalement vrai. Ce n'est pourtant pas évident au premier visionnage.
Car il semble avoir de petits défauts, ce Skyfall, au premier abord, défauts qui, au final, disparaissent totalement, ne sont plus des défauts. Par exemple, la James Bond Girl, insipide (pas l'actrice, quoique, mais le personnage), et qui disparaît assez rapidement dans l'histoire : à peine le personnage joué par Bérénice Marlohe apparaît que, disons 20/25 minutes plus tard, il disparaît, et définitivement : une balle dans la tronche, ça pardonne pas. On a aussi le méchant, joué par Bardem (à qui la couleur péroxydée, pour les cheveux, ne va pas du tout), qui ne semble pas des plus enthousiasmants. Mais au final, sans être le THE méchant de la saga (des personnages comme Goldfinger, Zorin et bien évidemment Blofeld sont inoubliables), il est vraiment intéressant. Semblant s'inspirer en partie du roman L'Homme Au Pistolet D'Or (le dernier roman de la série écrit par Ian Fleming, un roman assez étrange et n'ayant qu'infiniment peu de liens avec le film du même nom dans la saga), dans lequel un James Bond très affaibli après de dures épreuves est mis, justement, à l'épreuve avec une mission-suicide, Skyfall, sinon, est un film rempli de scènes d'action remarquables, comme celle qui ouvre le bal, en pré-générique ; cette séquence, qui se passe à Istanbul en Turquie, et met en scène la casbah de la ville et un train (mais pas en même temps, quand même), est assurément une des meilleures de la série, une des toutes meilleures. On en prend plein la gueule dès le départ. Mais cette séquence se finit brutalement par Eve (Naomie Harris), un agent secret britannique qui, devant éliminer le mec avec qui Bond se bat sur le toît du train, tire malencontreusement sur 007, l'expédiant dans l'eau, sous les rails.
Générique assez mortifère (crânes, tombes, sang...), This is the end comme le chante Adele dans la chanson-titre...on se dit que ça démarre bizarrement. De ce fait, Bond fait reparler de lui, alors qu'on le croit mort, et alors que le MI-6 est victime d'un attentat (les locaux explosent). Bond est de retour, mais en petite forme : il passe des tests, qui ne sont pas des plus concluants. Mais il force quasiment la main à M afin qu'elle le reprenne en service actif. Pas au mieux de sa forme, Bond part à la recherche d'un certain Silva (Javier Bardem), ancien agent secret britannique ayant été viré et ayant, depuis, quelques choses à reprocher au MI-6... Un mec incontrôlable, dangereux, féru de gadgets high-tech, et menaçant l'Angleterre des pires extrémités... Pour une fois, l'ennemi vient de l'intérieur !
Acteurs remarquables, scènes d'action bluffantes, musique efficace, réalisation parfaite, Skyfall est un régal, qui fait revenir la fameuse Aston Martin DB7 de Goldfinger. Ainsi que le thème musical de ce film, si je ne m'abuse ! On découvre pas mal de choses sur l'agent secret ici, son passé, sa vie d'autrefois, et sans aller jusqu'à révéler ce qui se passe dans la dernière moitié du film, sachez que c'est juste incroyable, et assez inhabituel pour un film de la série. Bond morfle vraiment, ici, d'un point de vue moral, entre son état de santé qui n'est pas au mieux, et ce, dès le départ, et des souvenirs qui remontent. On notera aussi le final du film, qui rappelle de grands souvenirs, et augure du meilleur pour la suite. Daniel Craig, au moment de la sortie de Casino Royale (à moins que ça ne soit au moment de la sortie de Quantum Of Solace), dira qu'il était prévu de faire une trilogie de film détruisant tout ce que les gens connaissent de la saga, afin de la reconstruire, 007 Année Zéro (zéro sept, ah ah ah). La preuve par l'image avec le final de Skyfall, qui entre totalement dans la catégorie ça vous dit quelque chose, tout ça, hein ? tout en étant plus moderne (ordinateurs, portables, etc). Un recommencement, une sorte de prologue en trois volets ,voilà ce que sont les trois films avec Craig (en attendant le quatrième, qui devrait être plus traditionnel, mais maintenant, on est totalement prêts à revoir du James Bond à l'ancienne, les bases sont relancées), et Skyfall en est le magistral point d'orgue.