SPOILERS !
Fantomes Contre Fantomes marque, pour Peter Jackson, une étape, une transition, entre ses premiers films, réalisés en Nouvelle-Zélande avec peu de moyens, d'une manière indépendante, et ses nouveaux films (la trilogie du Seigneur Des Anneaux et King Kong), réalisés avec d'immenses budgets. Tourné dans sa Nouvelle-Zélande natale (comme ce sera encore le cas de la future et cultissime trilogie), Fantomes Contre Fantomes (titre français ridicule, titre original The Frighteners), sorti en 1996, est un alliage entre comédie fantastique débridée et film d'épouvante tout à fait sérieux. Le film alterne grands moments comiques et passages vraiment flippants.
Le film existe en deux versions : la version connue de tous, d'une durée de 1h45 minutes. Et une version augmentée de 12 minutes supplémentaires. Si la première version suffit en elle-meme pour faire de ce film un classique, la seconde version est encore plus forte. Les deux existent en DVD, la première dans une édition triple DVD, et la seconde dans une édition quadruple DVD, vendue peu chère par rapport au nombre de disques qu'elle contient. Avis aux amateurs et fans !
Acteurs épatants (Michael J. Fox et Jeffrey Combs en tete), réalisation imparable, effets spéciaux du tonnerre de Dieu (faits par la propre société de Jckson, Weta), tout concourt à faire de ce film un monument. S'il n'y avait pas eu la trilogie du Seigneur Des Anneaux et King Kong, ce film serait le chef d'oeuvre absolu de Jackson. Pour ma part, je le place en seconde position après la trilogie, et avant King Kong (pourtant sublime) dans mon Top 3 jacksonien.
Allez, un petit résumé, ce qui ne va pas etre chose simple tant le film fourmille de pistes : dans une petite ville américaine, Frank Bannister (Michael J. Fox) exerce la profession de parapsychologue. Il se fait engager par des particuliers pour chasser des fantomes qui viennent s'infiltrer chez eux. Mais ces fantomes, s'ils existent réellement (et Frank, à cause d'un accident de voiture dont il fut victime quelques années plus tot, et dans lequel sa femme a péri, est capable de les voir, et de leur parler) sont des amis de Frank, des associés, qui hantent une maison, font en sorte qu'une carte de visite de Frank soit jetée sur les lieux, et se font 'chasser' par Frank, qui empoche le pactole. Une belle petite escroquerie, donc.
La ville, en meme temps, est visée par une épidémie de morts naturelles, mais pour le moins suspectes : de plus en plus de gens, d'age divers, décèdent de crise cardiaque. Bannister, ayant assisté à la mort d'un homme dans des toilettes publiques, a pu ainsi constater que ce n'est pas une épidémie de crises cardiaques (ce qui serait de toute façon improbable) mais en fait un fantome, ayant une apparence terrifiante (les Nazguls de la future trilogie lui ressemblent étonnamment), une sorte de Faucheuse. Sur chaque victime apparait, sur le front, un numéro, que seul Frank peut voir. Ce nombre avoisine la quarantaine.
Il s'avère, meme si Frank le découvrira plus tard, que cette Faucheuse n'est nul autre que le fantome malfaisant d'un serial killer condamné à mort et électrocuté vingt ans plus tot, Johnny Bartlett (Jake Busey). Bartlett, avec sa compagne de l'époque Patricia Bradley (qui, à l'époque, n'avait qu'une quinzaine d'année, et lui, 5 de plus) avait causé un massacre dans un hopital, en tuant 12 personnes (et en indiquant sur chaque front le numéro d'ordre de leur mort). Bartlett, fou criminel, se vantait, lors de son arrestation, d'avoir battu le record d'un autre tueur, en ayant tué douze personnes, et qu'il aurait largement pu en tuer davantage s'il n'avait pas été arreté. Frank découvrira plus tard que la première victime de cet ectoplasme sera sa femme, qui était en fait encore vivante au moment de l'accident, mais que le fantome aura achevé, faisant d'elle sa treizième victime...
Bartlett est mort, mais Patricia Bradley (Dee Wallace-Stone), elle, vit toujours, enfermée chez sa mère (qui voit en elle un suppot du Diable) depuis sa sortie de prison. Une jeune infirmière à domicile, Lucy Linskey (Trini Alvarado), ayant perdu son mari dans la vague de crises cardiaques douteuses, va s'intéresser de près à Patricia, vite rejointe dans ses recherches par Frank, qui va, avec ses amis spectres (un juge en ruine, un afro-américain de type Shaft et un étudiant souffre-douleur), faire la chasse à la Faucheuse...Les deux vivants (Lucy et Frank) se rendront vite compte que Patricia aime encore passionnément Johnny Bartlett, dont elle conserve les cendres dans sa chambre, et qu'elle est totalement sous l'emprise du fantome - ce qui ne l'empeche pas d'etre totalement dérangée, à coté de ça.
Tout irait pour le mieux (enfin...façon de parler) pour Frank si un agent du FBI, Milton Dammers (Jeffrey Combs), spécialisé dans les missions secrètes au sein de sectes et psychopathes - et totalement chamboulé au niveau mental à cause de ça, cotoyer Charles Manson laissant apparemment de gros soucis psychologiques - ne venait foutre son nez dans l'histoire, soupçonnant à tort Frank d'etre le responsable de la vague de morts que subit la ville, et meme le meurtrier de sa femme. Littéralement chtarbé, Dammers, avec son look à la Hitler (sans la moustache) et son regard de fou, va tout faire pour faire arreter Frank, et va rendre la situation encore plus impossible...
Hilarant, mais aussi très flippant par moments (la Faucheuse/Bartlett est vraiment impressionnante), le film sait jouer avec les spectateurs, comme dans cette séquence où Lucy met Frank en état de coma artificiel, afin qu'il puisse affronter la Faucheuse sur son propre terrain (pendant quelques minutes, Frank est donc cliniquement mort, et son ectoplasme sort de son corps - la question est de savoir si Lucy arrivera à réanimer Frank, ou s'il finira le film en tant que fantome).
Pas mal de clins d'oeils, aussi, du plus amusant (le fantome du sergent-instructeur de Full Metal Jacket, joué par Lee Ermey : grand moment de délire) au plus recherché (les visages de Melane Linskey et Kate Winslet, actrices du film précédent de Jackson, Créatures Célestes, sur les vrais corps du duo de meurtrières qui avaient défrayé la chronique en Nouvelle-Zélande dans les années 60 - et dont Créatures Célestes parlait - Pauline Parker et Juliet Hulme ; cette image est visible sur une jaquette de cassette vidéo regardée par Lucy Linskey, au début du film. Sur la jaquette se trouvent aussi Johnny Bartlett et Patricia Bradley !). Marrant, aussi, le lien entre Lucy Linskey et l'actrice Melanie Linskey, qui apparait quelques minutes dans le film !
Totalement réussi, voici un film qu'on ne se lasse pas de revoir. Entre la performance de Michael J. Fox, celle, totalement imprévisible, de Jeffrey Combs (vraiment allumé, surtout dans la dernière ligne droite du film - voir la scène du cimetière, où il déchire sa chemise pour montrer un torse couvert de signes et de scarifications diverses - voir photo au-dessus), le film est un pur moment de bonheur, jubilatoire. Une comédie fantastique qui oscille à merveille entre l'épouvante la plus pure et l'humour, sans jamais paraitre grotesque.
Peter Jackson en grande forme, dans un film qui compte beaucoup pour lui. Son premier gros budget. Pour info, c'est juste après le tournage de ce film, quand la vision de la trentaine d'ordinateurs de la Weta, désoeuvrés, lui apparut, qu'il eut l'idée de réaliser Le Seigneur Des Anneaux. Fantomes Contre Fantomes est donc un film extrèmement important dans la filmographie jacksonienne. C'est d'autant dommage que le film n'ait pas obtenu de vrai succès lors de sa sortie en 1996, faisant du film le seul échec commercial de la carrière de Peter Jackson...