Mes films de chevet...

27 janvier 2019

"Mes couleurs...elles coulent dans mes veines..."

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Spoilers...

Voici un de mes films préférés. Un film que j'ai découvert sur Canal + il y à longtemps (en 2001), via l'émission, géniale et défunte (elle a duré de 1998 à 2002) de Jean-Pierre Dionnet, "Quartier Interdit", qui diffusait, chaque semaine, un film d'horreur, gore ou trash, bizarre, un film rarement diffusé et en tout cas, pas le genre de film à être diffusé à 20h50 sur France 2 ou M6. Le même Dionnet avait une autre émission, bien plus ancienne (de 1989 à 2007), "Cinéma de Quartier", qui diffusait de vieux films (de tous genres : westerns, fantastique, péplums, guerre, drames, comédies, SF, horreur non gore, aventures), là aussi de manière hebdomadaire. C'est en grande partie l'arrêt de cette émission, en 2007, qui m'a poussé à arrêter mon abonnement à la chaîne cryptée, pour tout vous dire. Mais revenons au film que je veux réaborder (l'ancienne chronique remontait à 2009 et commençait à sentir le moisi). Je l'ai donc découvert courant 2001 via "Quartier Interdit", et je n'avais tout simplement jamais entendu parler de ce film avant de le voir programmé dans cette émission qui m'a fait découvrir ou redécouvrir des films tels que La Dernière Maison Sur La Gauche, L'Enfer Des Zombies, Le Corps Et Le Fouet, Les Feebles, Flesh Gordon, Les Raisins De La Mort et autres Henry : Portrait Of A Serial Killer. Déjà adorateur de films d'angoisse et d'épouvante, et notamment des films italiens des années 60/70 (Dario Argento, Mario Bava, Lucio Fulci...), j'avais été très intéressé par ce film, dont je n'attendait, je dois dire, franchement peu de choses avant de le visionner. Ce film est réalisé en 1976 par Pupi Avati (un réalisateur ayant contribué au scénaio du Salo Ou Les 20 Journées De Sodome de Pasolini, et ayant réalisé un grand nombre de films, de son premier en 1970 à son dernier en date, en 2014). Il porte un titre qui ne pouvait que fortement me donner envie de le regarder. 

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Ce titre, en effet, c'est La Maison Aux Fenêtres Qui Rient. Alias, en VO, La Casa Dalle Finestre Che Ridono. Le film a obtenu, en 1979, le Prix de la Critique au Festival du film fantastique de Paris, et a été nominé, en 1983, au prix du meilleur film au festival Fantasporto. Je ne sais pas si le film est sorti en salles en France, toujours est-il qu'il n'existe aucune affiche française du film hormis celle du DVD, et d'une antique édition VHS de 1991 pour laquelle le film fut renommé La Porte De L'Enfer. Ce qui est d'un stupide intersidéral car non seulement il n'y à pas de porte de l'enfer dans le film (et le visuel de la VHS avec ces mains qui sortent de terre est totalement idiot, rien de tel dans le film), mais on pourrait croire à un film fantastique alors que c'est un film d'horreur sans élément fantastique. Un film d'angoisse et de suspense, un thriller. J'aurais limite envie de dire que c'es un giallo (thriller horrifique typiquement italien, genre dans lequel Bava et Argento se sont surpassés), mais en fait, non, il n'en respecte pas tous les codes. Mais on n'en est pas loin, au final. Déjà dans son titre étrange, nébuleux, qui augure de quelques mystères dans l'intrigue du film, et qui fait penser aux titres des gialli d'Argento (la fameuse "trilogie animalière" de 1969/1971, des films aux titres tels que Quatre Mouches De Velours Gris ou Le Chat A Neuf Queues) et d'autres réalisateurs.

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Le film est interprété par des acteurs sans doute assez connus en Italie, mais qui ne le sont pas en France, hormis le premier cité, qui a joué dans Le Jardin Des Finzi Contini en 1970, Lino Capolicchio. On a aussi Francesca Marciano, Gianni Cavina, Eugene Walter, Bob Tonelli, Giulio Pizzirani, Ferdinando Orlandi, Pina Borione, Pietro Brambilla, Andrea Matteuzi, Flavia Giorgi et Vanna Busoni, vous voyez bien que ce ne sont pas des acteurs connus en dehors de l'Italie (et encore, même en Italie, ces noms ne doivent pas dire grand chose à certains). La musique du film, signée Amedeo Tommasi, est tour à tour très calme ou franchement angoissante, et fonctionne parfaitement selon les scènes où elle est employée (les thèmes lugubres accentuent le côté glauque et angoissant du film). Le scénario est signé Pupi Avati, de son frangin Antonio, de Maurizio Constanto et de l'acteur Gianni Cavina qui joue dans le film. La réalisation est solide, la photographietrès belle (le film date certes de 1976, mais à le voir, n'a pas pris un trop gros coup dans l'aile). Le seul reproche que je peux faire à ce film, c'est son doublage VF : épouvantable, tout simplement, entre voix qui ne cadrent pas avec les personnages, intonations ratées... mais le DVD ne propose pas de sous-titrages français pour le film : la VF ou la VO italienne pure, sans sous-titres, alors à moins d'être italophone... De toute façon, étant donné qu'en Italie, on redubbait souvent, en studio, les voix après le tournage, il doit y avoir, même en VO, un effet 'doublage' dans le film, et ce n'est jamais totalement réussi !

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L'action de ce film se passe au moment de la réalisation (aucune date n'est donnée, mais les véhicules et matériel indiquent que l'action est contemporaine à la réalisation), dans un petit village situé non loin de Ferrare, dans la région d'Emilie-Romagne, en Italie, vers les Valli di Comacchio (bassins de pisciculture). Cette région d'Italie, campagnarde, est celle de la naissance de personnalités telles que Pasolini, Antonioni, Fellini, Bertolucci, Luciano Pavarotti, du cycliste Marco Pantani, de Laura Pausini, d'Enzo Ferrari, du skieur Alberto Tomba, de Zucchero, Ferruccio Lamborghini (fondateur de la marque), Laura Betti, mais aussi du sinistrement célèbre Mussolini. C'est la fin de la partie historique de l'article, on va maintenant parler du film tel quel. Stefano (Lino Capolicchio) est un jeune artiste peintre et restaurateur, qui arrive dans un petit village d'Emilie-Romagne où il a été engagé pour restaurer une fresque située dans l'église communale. Cette fresque représente le martyr de Saint Sébastien (un saint qui fut criblé de flèches), dans un style très réaliste et choquant. La fresque est bien abimée, seul le centre (le saint) est visible, le reste est recouvert de salissures et moisissures. Stefano apprend du prêtre (Eugene Walter) que le peintre, mort depuis une vingtaine d'années, et qui s'appelaie Bruno Legnani, était fou. Stefano commence son travail et s'installe à l'auberge du petit village, faisant la connaissance avec Francesca (Francesca Marciano), arrivée en même temps que lui, qui commence un travail d'institutrice.

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Stefano retrouve, au village, Antonio (Giulio Pizzirani), un ami, qui travaille dans les bassins de pisciculture pour les étudier, et qui est à l'origine de l'arrivée de Stefano au village (ayant intercédé pour qu'on l'engage pour la restauration de la fresque). Antonio lui dit qu'il y à de lourds secrets dans le village, que les habitants ne sont pas des plus amicaux en général, et qu'il y à des choses qu'il doit lui dire, notamment au sujet d'une maison dont les fenêtres rient. Quelques jours plus tard, alors que Stefano continue son travail, Antonio est retrouvé mort, il tombe d'une fenêtre et se fracasse la tête au sol. Ayant vu la scène, Stefano est persuadé que ce n'est pas un accident. D'autant plus qu'il va commencer à recevoir des appels téléphoniques curieux et menaçants. Et puis, un jour, on lui annonce que sa chambre d'hôtel va devoir être libérée pour un client fidèle venu en cure (il y à une cure thermale en ville). Grâce à Lidio (Pietro Brambilla), le bedeau de l'église, un homme curieux et selon toutes apparences un peu idiot, il s'installe au rez-de-chaussée d'une maison isolée et un peu décrépite, située dans un grand parc, et inhabitée. Enfin, sauf à l'étage, où vit une vieille dame impotente dans son lit (Pina Borione), que Stefano trouve assez sympathique. Intrigué par les dires un peu avinés de Capolla (Gianni Cavina), le chauffeur du maire, qui, publiquement, à l'auberge, a clamé qu'il savait des choses et qu'il en avait marre de se taire, Stefano décide de lui tirer les vers du nez. Il en apprend plus sur Legnani, le fameux peintre, surnommé le "peintre de l'agonie" car non seulement il mélangeait son propre sang à ses couleurs mais il adorait peindre des gens sur le point de mourir, sur leurs lits de mort (dont la propre mère de Cappola).

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Capolla lui parle des deux soeurs du peintre, qui selon lui étaient aussi dingues que lui (le peintre s'est immolé par le feu) et le fournissaient en modèles. Autrement dit, comme le peintre peignait des moribonds, elles se chargeaient parfois de tuer pour qu'il représente les victimes. Victimes qui, selon lui, sont enterrées dans le sol devant l'ancienne maison du peintre, située au bord de la route, et dont une des façades montre des bouches autour des fenêtres (Stefano comprend ainsi la très nébuleuse allusion de son ami Antonio sur une maison aux fenêtres qui rient). Stefano (qui démarre une relation sentimentale avec Francesca, qui s'installe avec lui dans la villa) découvre rapidement, dans le grenier de la maison, un magnétophone à bande. On y entend un homme parler, d'une voix froide, apeurée et atone, de couleurs, de veines, de peinture, un vrai délire monomaniaque terrifiant. Stefano est persuadé qu'il s'agit de la voix du peintre, mais alors qu'il fait venir Coppola chez lui pour lui faire écouter la bande, celle-ci se retrouve effacée. Il se rend aussi compte, au fur et à mesure qu'il restaure la fresque, que deux personnages féminins grimaçants et armés de couteaux de boucher sont de chaque côté du saint martyr, et que ces deux femmes ressemblent beaucoup aux soeurs de Legnani. Un jour, il a la désagréable surprise de constater que quelqu'un a massacré la fresque dans l'église avec de l'acide, nouvelle menace. Le piège va lentement se refermer sur un Stefano avide de vérité, une vérité qu'aucun des habitants du village ne veut voir ressurgir...

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Je ne vais pas révéler le final du film, mais sachez qu'il est du genre qu'on n'oublie pas. La Maison Aux Fenêtres Qui Rient est un film qui distille une atmosphère lugubre, glauque, vraiment angoissante (et la musique de Tommasi y est pour pas mal), et quand on voit le film pour la première fois, il est littéralement impossible de deviner le final. Ce film, un vrai chef d'oeuvre du genre, prouve qu'il n'y à pas besoin de déferlements gore (il y en à un petit peu, vers la fin, sans oublier le très étrange et marquant générique - j'en parle juste après - mais pas tant que ça) et d'éléments fantastique pour foutre les jetons. Rien de surnaturel ici, le film est un thriller de suspense, tout simplement, sur un lourd secret collectif enfoui et qui sera découvert par un jeune curieux, intrus au village, et que rien ne fera flancher. Personnages étranges et louches (on les soupçonne tous, même si tous ne sont pas négatifs ; aucun n'est, en tout cas, totalement innocent), ambiance pesante, musique glauque, réalisation intelligente, scénario diabolique, tout concourt à faire de ce film un régal dans son genre. On notera la beauté rustique de la région de tournage, sublimée dans le film, et qui participe pleinement à la réussite de l'ensemble : à la différence de pas mal de films du genre qui se passent dans de grandes villes, ici, c'est en pleine campagne, dans un village paumé et d'apparence charmante que l'horreur a lieu.

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Et comme je l'ai dit, un autre atout du film c'est son générique de début. Il est du genre inoubliable là aussi. On y voit un homme, attaché par les bras à un crochet au plafond, comme un quartier de viande, torse nu, en train de se faire planter par des couteaux de boucher. On l'entend hurler atrocement avant que ses cris ne cèdent la place à la voix du peintre (la même que par la suite, on entend dans le film, et disant les mêmes mots) énoncer une litanie glauque et oppressante sur les couleurs, d'une voix terrifiante et terrifiée (la VF est pourrie, mais au moins, pour cette voix, on ressent des frissons tant elle inspire l'inquiétude et la folie). Tout en continuant de voir ce supplicié. Le tout, avec des teintes sépia crades qui ne permettent pas de voir les décors et qui font très snuff movie. On est direct dans le ton avec ce générique qui interdit définitivement au film toute diffusion en première partie de soirée. On est d'emblée mal à l'aise, et on se demande à quelle sauce le reste du film (qui dure 105 minutes) va nous manger. Si le reste du film est doté d'un rythme assez (volontairement) lent, sous le soleil d'Emilie-Romagne, son final, comme je l'ai dit plus haut et sans le révéler, est du genre à vous scotcher sur votre siège. Le genre de final qui donne férocement envie de revoir le film pour voir si ça fonctionne tout aussi bien en sachant ce qui se passe à la fin (et la réponse est : oui). Le genre de final, et le genre de film, qui est capable de rendre amoureux de ce genre de productions à peu près n'importe qui. La Maison Aux Fenêtres Qui Rient, dont le seul défaut majeur est un doublage VF franchement pourri (la voix de l'employée de l'hôtel...celle de Capolla...celle de Stefano, aussi, par moments...), est un film génial, rare, méconnu et à (re)découvrir absolument. Seul problème : son DVD français (de très bonne qualité audio et visuelle, mais sans aucun bonus et sans sous-titres français ; mais avec la VF) est de nos jours difficile à trouver à bon prix, il est souvent vendu vers les 30 €... Mais la qualité du film mérite une dépense !

Posté par Alice In Oliver à 10:45 - - Permalien [#]
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21 janvier 2019

La suite que personne n'attendait...nanar, ou pas nanar ?

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Spoilers !

Encore une fois, un film venant tout juste (le 20 janvier dernier) d'être rediffusé est à l'honneur sur le blog. Si vous m'aviez demandé, il y à 10 ans, si j'avais l'intention d'aborder ce film ici, j'aurais répondu un non si tonnant et vibrant qu'on l'aurait sans doute entendu de la face cachée de la Lune. Mais que voulez-vous, à force de voir et revoir certains films qui, pourtant, ne mériteraient vraiment pas tant d'honneurs (je revois ce film à chaque diffusion TV, ne l'ayant pas en DVD, et il passe relativement souvent depuis que la TNT existe ; avant, c'était plus espacé), on se prend à s'attacher à eux, d'une certaine manière. J'ai vraiment hésité, comme pour Tremblement De Terre récemment, à classer ce film dans les nanars. Je ne l'ai pas fait pour le film catastrophe avec Heston, mais c'était de justesse. Je le fais avec ce film de guerre, et là aussi, c'est de justesse. Disons que je devrais créer une catégorie 'nanars polémique', comme sur Nanarland, et dans laquelle je rangerais les films que je sais ne pas être très bons, des films à la limite du nanar, sans en être vraiment. Et des films que j'aime beaucoup malgré leurs évidents défauts. Car des défauts, ce film, par exemple, en possède quelques uns, des sévères. 

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Mais allez, je l'aime bien, ce film, tout de même ! Sorti en 1978, il s'appelle L'Ouragan Vient De Navarone (Force 10 From Navarone en VO) et est réalisé par Guy Hamilton, réalisateur britannique connu essentiellement pour avoir signé quatre James Bond (dont deux des meilleurs, Goldfinger et Vivre Et Laisser Mourir), mais aussi La Bataille D'Angleterre, Meurtre Au Soleil et Le Miroir Se Brisa (deux adaptations d'Agatha Christie). Le film est une adaptation du roman du même nom, signé Alistair McLean, et est aussi une sorte de suite des Canons De Navarone (aussi une adaptation d'un roman du même auteur, le film date de 1961). Je dis une sorte de suite car en dehors du fait que les deux personnages principaux sont les mêmes, et d'un prologue qui résume le premier film, il n'y à rien à voir dans les intrigues des deux volets. Vous pouvez voir ce film sans avoir vu le précédent, et tout piger tout de même. Il est bien entendu préférable de voir Les Canons De Navarone tout de même, ne serait-ce que pour une seule raison : ce film de Jack Lee Thompson, avec Gregory Peck, David Niven et Anthony Quinn, est un des meilleurs putains de films de guerre de son époque, un grand spectacle remarquable qui fut à sa sortie un triomphe au box-office. 

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Ce qui ne fut pas le cas de la "suite" réalisée par Hamilton. A sa sortie, L'Ouragan Vient De Navarone, malgré son affiche alléchante (j'y reviens), sera un échec commercial et critique, un four monstrueux. Le film ne deviendra culte que par la suite, et a été depuis assez réhabilité. Pas totalement réhabilité, mais disons que le film est bien plus apprécié désormais qu'à sa sortie. Il faut dire qu'il y à de quoi satisfaire les amateurs de bons divertissements du dimanche soir : le casting est, comme je l'ai dit, réussi, et on y trouve du suspense et de l'action à gogo, et des scènes vraiment réussies. Niveau casting, on a Robert Shaw (qui mourra six mois après la fin du tournage, et je crois, juste après la sortie britannique du film) qui reprend le rôle tenu par Gregory Peck dans le premier film ; Edward Fox, qui reprend celui tenu par David Niven dans le premier film (Peck et Niven étaient trop âgés pour reprendre leurs rôles ; l'action de ce second volet se situe quelques mois après celle du premier volet, mais 17 ans séparent les deux films !) ; Harrison Ford qui, à l'époque, sortait du succès de La Guerre Des Etoiles ; Carl Weathers, célèbre à l'époque pour son rôle dans Rocky ; Barbara Bach - alias Mme Ringo Starr - et Richard Kiel, qui tous deux ont joué dans L'Espion Qui M'Aimait (un des meilleurs James Bond, et le plus récent à l'époque) ; et Franco Nero, connu pour avoir joué Django dans le western spaghetti du même nom, dans les années 60. On notera aussi Michael Byrne dans le rôle d'un officier nazi ; dans Indiana Jones Et La Dernière Croisade (1989), ce même acteur jouera un rôle identique d'officier nazi, toujours face à Harrison Ford ! Notons aussi que Shaw a joué dans un James Bond, Bons Baisers De Russie, et Edward Fox aussi (le non-officiel Jamais Plus Jamais).

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L'action de ce film se passe en 1943. Mallory (Shaw) et Miller (Fox), héros de l'opération Navarone, sont réquisitionnés par leur Etat-Major pour une nouvelle mission : débusquer et mettre définitivement hors d'état de nuire un espion travaillant, en Yougoslavie, pour les nazis, en se faisant passer pour un capitaine de la résistance locale, Lescovar. Sous ce nom d'emprunt se cache en réalité Nicolaï, un homme qui, au cours de leur précédente mission, les a trahi. Afin de mener à bien leur mission, ils devront incorporer un groupe de soldats chargés d'une mission secrète en Yougoslavie, la Force 10, menée par le jeune colonel américain Barnsby (Ford), qui n'est pas très content de devoir se coltiner ces deux Britanniques qui risquent fort de ralentir sa propre mission. Mais Barnsby n'a pas le choix. Le groupe doit décoller de la base alliée de Termoli, en Italie, et compte tenu que les précédentes missions parties de cette base ont été la cible de trahisons, Barnsby décide que le groupe partira discrètement, en loucedé. Au moment d'embarquer dans l'avion, ils sont pris à partie par des MP's qui étaient chargés de ramener un militaire déserteur. Une bagarre rangée survient, les MP's sont neutralisés. Le déserteur, un infirmier militaire du nom de Weaver (Weathers), monte à bord de l'avion, de son propre chef, sans demander la permission. 

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L'avion, victime d'une attaque de la Luftwaffe, est touché. L'équipage saute en parachute et atterrit, non loin de leur destination. Ils vont être capturés par une bande de soldats Tchetniks (des soldats civils Yougoslaves historiquement chargés de repousser les Allemands) à la solde des nazis, et dirigés par l'imposant Drazak (Kiel), qui se sont au début fait passer pour les résistants que la Force 10 doit rejoindre. Par une ruse assez improbable, Mallory et Barnsby parviennent à s'échapper du camp, en partie grâce à une Tchetnik, Maritza (Barbara Bach), et gagnent, tandis que les autres sont toujours prisonniers des Tchetniks et des nazis, le camp des résistants, dirigés par Petrovic (Alan Badel). Mallory, qui apprend que Maritza est la fille de Petrovic et qu'elle est infiltrée dans le camp adverse, reconnaît Nicolaï en Lescovar (Nero), mais alors qu'il le confond, Petrovic lui apprend que le vrai Nicolaï, effectivement un espion, a été reperé et exécuté par les résistants. Mallory, Barnsby et Lescovar partent récupérer les autres au camp des Tchetniks, afin d'essayer de sauver ce qui peut l'être de la mission de la Force 10 : faire sauter un pont pour empêcher le déferlement de l'armée allemande. Mais Mallory semble avoir une bien meilleure idée pour que la mission s'accomplisse, le dynamitage du pont semblant en effet des plus impossible à effectuer...

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Les acteurs sont franchement bons (Shaw n'était apparemment pas à l'aise durant le tournage, mais ça ne se ressent pas ; Ford a apparemment eu des soucis avec le réalisateur sur sa manière de jouer et garde un mauvais souvenir du film, mais là aussi, ça ne se ressent pas), avec une réserve pour Carl Weathers dont le personnage est aussi horripilant que foncièrement inutile : un déserteur très susceptible (il ne supporte pas, et c'est bien normal, de se faire traiter de nègre), vrai cheveu sur la soupe pour le reste de l'équipe car il s'est incrusté sans demander leur avis, et en plus, à un moment donné, il se paie le luxe de gueuler qu'il n'a rien demandé et qu'il en a marre de risquer sa peau pour un truc comme ça. Une scène ridicule, embarrassante même, et surtout, totalement inutile et invraisemblable. A ce moment précis, le film flirte franchement avec le nanar d'action. Sans parler de certains effets spéciaux (une décapitation, par câble dressé sur la route, d'un Allemand, qui sent bon son mannequin en cire) et d'un final qui font assez limite. Parlons-en, du final (et au fait, j'ai prévenu, comme toujours, qu'il y à des spoilers dans l'article, alors si vous ne voulez pas savoir ce qui se passe à la fin, sautez un paragraphe) : la Force 10 veut faire sauter, de l'intérieur, un barrage situé à quelques centaines de mètres du fameux pont, afin que le déferlement de l'eau fasse saper les fondations du pont et le fasse s'écrouler (ce qui arrive en effet). Mais je suis sceptique sur le fait qu'en aussi peu de temps, l'eau fasse s'écrouler, de la sorte, le pont. C'est clair qu'une telle chose est possible, l'eau est un élément que l'on dit être le seul à ne pas pouvoir empêcher ou contrôler humainement, mais en aussi peu de temps (car dans l'action du film, c'est l'affaire, apparemment, de quelques minutes), ça me semble improbable. Mais c'est du cinéma, après tout !

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La réalisation est solide parfois, moyenne dans d'autres, et grosso modo, sans surprise, et le scénario (qui apparemment est très éloigné du roman de McLean) est correct, et on passe vraiment un bon moment devant ce film tout sauf réussi, il faut bien l'avouer, mais qui permet de divertir durant une soirée. Cependant, entre des personnages caricaturaux (le déserteur de couleur susceptible et irascible, qui semble aussi être un peu neuneu parfois ; le chef Tchetnik joué par Kiel, qui surjoue un peu ; Edward Fox, amusant mais parfois un peu trop léger, dans le rôle de Miller, un fou de l'explosif), de séquences un peu gênantes (celle du pétage de plombs de Weathers ; celle de l'ordonnance de l'officier nazi, obnubilé par le règlement au point de se faire tuer comme un con ; celle où Mallory, devant Lescovar, affirme que ce dernier est un espion qu'il doit et veut tuer, et au cours de laquelle ce dernier se contente de rire, incident terminé, l'air de dire oh toi alors, tu me fais bien rigoler). Sans parler du départ assez improbable de la Force 10 de la base de Termoli, au début, comme des voleurs. L'Ouragan Vient De Navarone (un titre français qui joue sur le titre original, Force 10, mais est au final assez racoleur et maladroit) n'est peut-être pas un nanar, tout compte fait (ni un navet), juste une série B de guerre honnête, et pas honteuse, mais il est pour moi à la limite du nanar tout de même. Je sais que le classer dans cette catégorie est limite, sans doute maladroit (comme le film), surtout que je le vois plus comme un plaisir coupable. Mais c'est un film que, malgré ses défauts, j'apprécie toujours autant de revoir. 

18 janvier 2019

Sadisme vernien

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Spoilers...

Je n'ose imaginer la tête des spectateurs qui, au moment de la sortie de ce film (pour la France, ce fut en 1972, assez discrètement, et dans une version un petit peu, mais pas tant que ça, édulcorée), pensant avoir affaire à un film familial parce qu'adapté d'un roman de Jules Verne, emmenèrent leur marmaille avec eux dans les salles pour le voir en famille, et se sont retrouvés avec...ça. Autant le dire, malgré le carton vert au verso du boîtier DVD indiquant 'tous publics', ce film ne l'est pas, pour tous publics. Il n'a jamais été officiellement interdit aux moins de quelque chose, du moins chez nous, mais il est évident, en regardant Le Phare Du Bout Du Monde, qu'il est à réserver aux adultes. C'est une oeuvre sombre, violente et brutale, beau rendu visuel de l'assez nihiliste roman de Verne (un roman sorti de manière posthume et comptant, avec Le Chancellor, parmi les plus sombres de l'auteur), magnifié par une photographie (de Henri Decaë) sublime. A sa sortie, apparemment, le film durait 25 minutes de moins (soit, en tout, quelque chose comme 98 minutes, car la version totale, présente en DVD, dure 123 minutes), et était donc moins violent. Mais il devait tout de même l'être pas mal. Ce film, réalisé par le méconnu Kevin Billington, coproduction, tournée en Espagne, entre l'Espagne, les USA, le Lichtenstein (oui ! vous avez bien lu) et l'Italie, est une série B d'aventures et de drame que je me souviens avoir vu, à la TV, il y à longtemps, genre plus de 25 ans. Enfin, en tout cas, il y à plus de 22 ans, car, moyen mnémotechnique que j'ai pour le savoir, j'ai déménagé il y à 22 ans, et quand je l'ai vu, j'étais encore dans mon ancien domicile. Et ça faisait alors quelques années que je l'avais vu, quand j'ai déménagé il y à 22 ans, donc, je pense que j'ai du le voir pour la première fois il y à 25 ou 26 ans, et j'en aurai 37 en octobre 2019, voyez donc quel âge j'avais, à peu près, au moment de ce visionnage.

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Je ne suis pas sûr que c'est la version longue que j'ai vu à l'époque (redécouverte dans les années 80, elle a été diffusée en TV à partir des années 90, mais le film n'a pas été souvent diffusé, c'est le cas de le dire), mais c'est peut-être le cas. Car certains passages assez choc du film m'étaient restés en mémoire : la mort du singe, l'homme écorché vif. Si jamais la version courte proposait ces deux séquences assez sadiques, alors la censure a été faite portnawak à l'époque, c'est le cas de le dire ! Le film, je l'ai revu récemment, et je l'avais, auparavant, revu quand j'ai acheté le DVD il y à quelques années (au passage, chose amusante, l'édition, double, propose le film en VF sur le premier disque, et en VOST sur le second, ce qui est pratique - pas besoin de tripatouiller le menu 'configuration' pour sélectionner la langue -, mais un peu excessif aussi). Entre le premier visionnage et le second, cependant, on pouvait compter 15 ans d'écart. Demandez à quelqu'un qui a vu un film il y à 15 ans, et qui s'apprête à le revoir pour la première fois depuis tout ce temps, s'il s'en souvient bien, du film, vous aurez de fortes chances, à moins que ce film l'ait enchanté autrefois, qu'il vous réponde par la négative. Mais si le film vous a plu, vous a scotché, vous a marqué (ou choqué), alors il y à de fortes chances qu'il en soit resté, collés dans votre cerveau, dans votre mémoire, des passages entiers, des détails, des scènes. En ce qui me concerne, ce fut le cas pour ce film. Je me rappelle avoir été un peu heurté par ce film, vu enfant au cours d'une rare diffusion TV (c'était sur le câble, mais ne me demandez pas sur quelle chaîne), je ne m'attendais pas à une telle violence...et sans doute que mes parents non plus ! Mais j'avais aussi état emballé par cette histoire mettant en scène, dans des décors sauvages, un homme face à une bande de pirates baroques qui ne ressemblaient vraiment pas à des pirates genre ceux des albums d'Astérix. Et chaque revisionnage du film est un enchantement.

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Le film bénéficie d'une distribution des plus hétéroclites, comme toute coproduction de série B des années 60/70. On a Kirk Douglas (par ailleurs producteur du film), Yul Brynner, Jean-Claude Drouot (alias Thierry La Fronde), Renato Salvatori, Samantha Eggar, Fernando Rey, Massimo Ranieri, ces deux derniers n'apparaissant que le temps d'une vingtaine de minutes. La réalisation est efficace, pas totalement glorieuse, mais absolument rien n'y est honteux ou embarrassant. Notons cependant que dans la seconde partie, le rythme est parfois un peu effréné, et que certaines séquences semblent un tantinet étranges, tant dans le scénario que dans la manière d'être filmées. La musique est très belle (et signée Piero Piccioni). Les acteurs sont absolument géniaux : Kirk Douglas, qui avait déjà joué dans une adaptation vernienne (20 000 Lieues Sous Les Mers en 1954), et qui joue un personnage différent du roman (il est américain, dans le roman il s'appelle Vasquez et est hispanophone), est très convaincant ; Brynner est impérial dans ce rôle de chef des pirates, charismatique, inquiétant (terrifiant même) et iconique ; Drouot joue un rôle de pirate (le second du chef) totalement dingue, quasiment muet, au look ahurissant, et assez flippant, très éloigné de ses premiers rôles. C'est lui sur la photo ci-dessus. Samantha Eggar joue bien, mais son rôle est assez peu utile (dans le roman, il n'y à aucun personnage féminin, comme souvent chez Verne). Salvatori et Rey sont très convaincants. 

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L'action se passe en 1865 sur une île vers le Cap Horn, vers la Terre de Feu, bref, non loin de l'Argentine. Un phare vient d'être construit et trois hommes sont nommés pour en être les premiers gardiens : Moriz (Fernando Rey) est un vieux marin à la retraite ; Felipe (Massimo Ranieri) est jeune, inexpérimenté, et a pour compagnon un petit singe capuçin du nom de Mario avec lequel il passe son temps à arpenter les lieux (l'île est rocailleuse, sauvage, très peu de végétation et de faune) en jouant de la guimbarde ; et William Denton (Kirk Douglas), un Américain au passé tourmenté (on apprend qu'il a tué le mari de la femme qu'il aimait). Un jour, un bateau arrive, arborant un pavillon de détresse. Moriz et Felipe embarquent dans une chaloupe pour monter à bord, afin de venir en aide aux marins, selon ce qu'ils peuvent faire (leur apporter des soins, de la nourriture, de l'eau, du réconfort). De la maison des gardiens, éloignée du phare, Denton, avec une longue-vue, voit l'équipage, hétéroclite, armé, qui n'a pas vraiment l'air d'avoir besoin d'aide, on dirait des pirates. Il voit, impuissant, Moriz et Felipe se faire atrocement massacrer par ce qu'il faut bien appeler des pirates. Lesquels débarquent sur l'île et prennent contrôle du phare, qu'ils éteignent. Ce sont des naufrageurs (pirates qui faisaient couler les bateaux s'approchant des côtes en allumant de faux feux de phare, pour les tromper, et qui les dépouillaient ensuite), dirigés par le capitaine Jonathan Kongre (Yul Brynner), un homme sadique et terrifiant. Denton va se cacher sur l'île, en espérant soit que les pirates s'en aillent un jour pour continuer leurs méfaits ailleurs, soit qu'ils oublient son existence (peine perdue). Un jour, les pirates font s'échouer un bateau qui passait au large. Ils pillent le bateau, massacrent les passagers, sauf un homme (Renato Salvatori) sauvé par Denton, et une femme (Samantha Eggar) qui est, elle, récupérée par les pirates. Kongre, en la voyant, va trouver en elle un moyen pour que Denton se rende : elle ressemble beaucoup au portrait que Kongre a volé dans les affaires de Denton, représentant la femme dont Denton était amoureux et qui s'était mariée avec un autre, 10 ans plus tôt...

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C'est justement ce détail de l'intrigue, autour de la ressemblance (car ce ne sont pas les mêmes actrices qui jouent les deux rôles, la femme du passé de Denton apparaissant en flash-backs) entre les deux femmes, qui sont bien deux femmes différentes, qui passe difficilement. Ca semble un peu grossier, lourdaud, et surtout, totalement inutile, comme le personnage de cette jeune femme en général. Histoire de rajouter une touche féminine au film. Autre touche rajoutée (par rapport au roman), dans le film, c'est la violence, le sadisme. Clairement, comme je l'ai dit plus haut, Le Phare Du Bout Du Monde est un film brutal. Tout ou presque y passe : un homme est attaché à un mat du bateau et lentement écorché avec un andouiller ; un homme tombe dans un puits dans une grotte et l'eau écumeuse devient rouge ; assommé en haut du phare, un pirate est balancé dans le vide, ce qui était assez inutile, l'homme étant déjà mis hors d'état de nuire ; un homme est empalé par un andouiller enflammé ; la pauvre femme est, à la fin du film, violée en tournante (on ne voit rien, mais on sait ce qui se passe), son calvaire étant achevé par le bombardement du bateau par Denton, avec les propres canons des pirates (et précisons qu'elle est dans ledit bateau, et donc, qu'elle meurt elle aussi) ; un homme meurt, tombant en torche humaine enflammée du haut du phare ; même le petit singe est écorché par un pirate, ça se passe hors-champ, mais on a la vision du corps sanguinolent, ouvert en deux, du singe dans les mains du forban...

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Film violent, sorte de croisement entre Mad Max et Die Hard (un homme seul contre une tripotée de méchants) au pays des pirates en plein XIXème siècle, ce film est une belle réussite, pas totale toutefois, et une série B de haute qualité. Acteurs juste excellents (Brynner est clairement dans un de ses meilleurs rôles, un des plus iconiques de sa carrière avec Les Sept Mercenaires), réalisation solide qui n'abuse pas d'effets classiques de l'époque (genre zooms intempestifs ; ici, il n'y en à pas, ou très peu), scénario qui prend certes des libertés avec le roman, mais en respecte l'ambiance et la trame, durée idéale, Le Phare Du Bout Du Monde, qui n'est pas à réserver à la famille en raison de sa violence parfois sèche et parfois sanglante, et de son atmosphère de profond sadisme nihiliste, est un film à la fois dans l'air de son temps (à la même époque sortaient des films bien durs, tels que Les Chiens De Paille, Orange Mécanique, Soldat Bleu) et totalement à part. Une oeuvre rare, presque inclassable. Film d'aventures, de suspense, drame, film de pirates (bien plus terrifiants et sans doute proches de la réalité que les pirates de la fameuse trilogie avec Johnny Depp, qui joue à fond sur le folklore), survival, ce film est tout à la fois. A noter que le film ne sera pas un gros succès commercial, son côté un peu trop violent et sombre ayant sans doute joué en sa défaveur. Mais c'est un film à voir absolument, il y à de fortes chances pour qu'il vous reste longuement en mémoire !

17 janvier 2019

Ca va secouer !

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Spoilers...

Encore un petit film catastrophe pour continuer le cycle sur ce genre cinématographique. Celui-là, que j'ai chopé en DVD récemment, et que je n'avais encore jamais vu auparavant (j'en avais cependant rapidement entendu parler, je savais que le film existait, mais ça s'arrêtait là), mérite qu'on en parle (contrairement à la suite de L'Aventure Du Poséidon : Le Dernier Secret Du Poséidon, et aux trois abominables suites du déjà bien vieillot et un peu moyen Airport). Bien que je doive vous dire en toute sincérité que j'ai failli le ranger dans la catégorie des nanars. Sorti en 1974 (ou 1975, ça dépend des pays), ce film réalisé et produit par Mark Robson s'appelle Tremblement De Terre, ou Earthquake en anglais, et Erdbeben en allemand. Je sais comment ce film s'appelle en allemand car le DVD que je me suis chopé, bien que proposant la VF (laquelle est abominable comme souvent) et la VOST (et aussi une piste audio allemande), est un DVD Zone 2 made in Germany, et la jaquette est intégralement dans la langue de Merkel. Ja, ja, das ist terrible. Mais si vous le croisez sur le Net, n'ayez pas peur, il y à la VF, et il est parfaitement lisible en Frankreich. Le film est interprété par Charlton Heston, Ava Gardner, Lorne Greene, George Kennedy, Geneviève Bujold, Victoria Principal, Richard Roundtree, Marjoe Gortner (lequel est un évangéliste dans la vraie vie, et c'était déjà le cas au moment du tournage de ce film), Walther Matthau (dans un petit rôle bien rigolo d'ivrogne pour lequel il est crédité sous un nom fantaisiste), Barry Sullivan et Lloyd Nolan et il dure 120 minutes, durée lambda pour ce genre de films.

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Le film bénéficie de quelques stars au compteur, et d'un scénario co-écrit par George Fox et Mario Puzo, lequel n'est autre que l'auteur du roman Le Parrain. C'est un film qui, à sa sortie, marchera plutôt bien, suffisamment pour que d'autres films catastrophe soient, ensuite, faits (la même année sortira La Tour Infernale ; par la suite, les films catastrophe seront moins bons, jusqu'à la fin du genre, provisoire, en 1980 après des échecs retentissants), et qui a bénéficié, à l'époque, d'un tout nouveau procédé sonore, le Dolby Sensurround, qui employait des ondes sonores vibrantes dans les salles de cinéma, afin de simuler les vibrations des tremblements de terre (au cours d'une séance, en Californie, du plâtre tombera par petites plaques du plafond dans la salle durant la projection, à cause des vibrations Sensurround, ce qui entraînera sans doute une panique dans la salle). On peut dire que les effets spéciaux sont, aujourd'hui, la seule raison de voir ou revoir ce film moyennement réalisé par un tâcheron (Les Centurions, La Vallée Des Poupées, L'Express Du Colonel Von Ryan qui est probablement son meilleur film) qui signera encore un film en 1978 avant de mourir la même année. 

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Le film, qui ne vaut que pour ses effets spéciaux qui n'ont pas trop mal vieilli (bon, dans le genre, c'est évident que des films plus récents sont plus impressionnants, comme San Andreas par exemple, sur le même sujet), et pour son procédé technique impossible à reproduire chez soi, a failli se retrouver, sur le blog, dans la catégorie des nanars. En effet, il faut bien dire ce qui est : Tremblement De Terre n'a au final pas beaucoup de choses pour lui. Comme je l'ai dit, il dure 2 heures, quasiment tout rond (il en dure, en fait, un chouia moins), et il faut attendre quasiment la moitié du film pour que les choses démarrent (le tremblement de terre à proprement parler). Ensuite, une fois que ça démarre, hé bien ça ne s'arrête pas une seule seconde, et ça, déjà, c'est bien. Mais avant que l'action promise par le titre du film et son alléchant visuel d'affiche ne démarre, on doit se fader une grosse cinquantaine de minutes d'ennui autour des divers personnages du film (comme tout film catastrophe qui se respecte, il y à pléthore de personnages principaux, souvent caricaturaux) : l'architecte ancien sportif marié à la fille de son boss (respectivement : Heston, Gardner, Greene ; au passage, entre Ava Gardner et celui qui joue son papounet, Lorne Pa Cartwright Greene, peu de différence d'âge dans la réalité) ; la jeune mère veuve séduisante qui veut devenir actrice et qui séduit l'architecte (Bujold) ; le flic bougon, hargneux mais ayant au final un bon coeur (Kennedy) ; la jeune femme à qui il ne faut pas le faire, vrai garçon manqué mais très sexy quand même (Principal) ; le motard risque-tout qui n'a pas peur de risquer sa vie pour sauver des innocents et qui aurait facilement pu devenir un star sans ce séisme (Roundtree, qui joue aussi le rôle de la minorité ethnique obligatoire du film) ; et le méchant of ze film, un patron de supérette réserviste de la Garde Nationale, qui rejoint son unité une fois la catastrophe annoncée, et qui s'avère être un authentique malade psychopathe (Gortner).

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Pour ménager les susceptibilités, les autres minorités visibles sont présentes ici aussi : l'inévitable mioche un peu énervant, le tout aussi inévitable petit chien (le spectacteur lambda de ce genre de film sait bien que si jamais il n'y à que deux survivants à la fin du film, ça sera le gosse et le chien), et le vraiment inévitable poivrot rigolo, joué ici par Matthau. Il est temps désormais de parler de l'histoire. De quoi parle le film ? D'un tremblement de terre à Los Angeles, qui va sérieusement rouvrir la faille de San Andreas et risquer de faire s'effondrer le barrage de Hollywood. Les survivants cités plus haut vont évoluer dans la ville en décombres, en essayant de s'en sortir, ce qui est, il faut le reconnaître, aussi digne de louanges que franchement peu original. Mais comme je l'ai dit plus haut, on ne regardera pas Earthquake pour son scénario qui, bien que cosigné Mario Puzo, est vraiment le maillon faible ici (avec le doublage VF, épouvantable - voir la première scène entre Heston et Bujold, embarrassante). Les acteurs ne sont pas mauvais, pour la majeure partie d'entre eux, et les effets spéciaux tiennent assez bien le coup, comme la musique de John Williams, qui est très très bonne (mais c'est John Williams, c'est donc normal). Mais vraiment, on s'emmerde durant la première partie. On se dit mais quand est-ce que ça démarre, bordel à couilles ? Pour comparer, L'Aventure Du Poséidon, qui dure à peu près aussi longtemps, démarre son action (le bateau se retourne) au bout de, allez, un quart d'heure, ou ving minutes. Et pour La Tour Infernale, qui dure plus de 2h30, c'est au bout d'une demi-heure. Là, le film dure 2 heures, et on a une heure de vide ! C'est un peu comme Titanic qui montre le début du naufrage à la moitié du film (qui dure, je le rappelle, 3 heures) ! Mais bon, ça reste un film correct à voir un samedi soir, s'il n'y à rien d'autre à la TV. Un bon divertissement un peu kitsch, n'en attendez rien de plus...

10 janvier 2019

Par amour pour son fils

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Spoilers...

C'est reparti pour un petit peu de Roland Emmerich, je pense que vous devez en avoir marre, mais il m'en reste deux à aborder et ensuite, c'est fini. Après avoir abordé un film que j'estime personnellement être son meilleur (Le Jour D'Après, de 2004), voici un film très différent de ce qu'Emmerich avait l'habitude de proposer comme productions, et qui s'avère être son film précédent. Lui qui avait alors l'habitude des blockbusters de SF/catastrophe (et il en fera d'autres), pas toujours très fins et réussis (Godzilla...qui était, au moment de la sortie du film que j'aborde aujourd'hui, son film précédent), nous offre ici un film historique. Ainsi qu'un film de guerre (il est en train d'en faire un autre, Midway, qui sortira en fin d'année, sur la Seconde Guerre Mondiale). Ainsi qu'un drame, aussi. Ce film, qui s'inspire de personnages réels (mais renommés ici), et qui bénéficie d'un scénario de Robert Il Faut Sauver Le Soldat Ryan Rodat, c'est The Patriot : Le Chemin De La Liberté, sorti en 2000. Le film est interprété par Mel Gibson, Heath Ledger, Jason Isaacs, Tchéky Karyo, Chris Cooper, René Auberjonois, Joely Richardson, Lisa Brenner, Tom Wilkinson, Adam Baldwin et Donal Logue. Il nous offre la bagatelle de 165 minutes (175 minutes sur le DVD et Blu-ray qui propose une version director's cut) se situant aux USA durant la guerre d'indépendance, au XVIIIème siècle.

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L'action de ce film se passe en effet en 1776, en Caroline du Sud, un Etat d'Amérique sous domination britannique, c'est le général lord Cornwallis (Tom Wilkinson) qui dirige le pays pour le roi George. Mais depuis plusieurs années, la tension fait rage entre les Britanniques et les locaux, qui aspirent à l'indépendance. Alors que la guerre est déclarée contre les Anglais, Benjamin Martin (Mel Gibson), un héros de la guerre contre les Français (plusieurs années auparavant), membre du conseil de ville, décide de ne pas voter pour le conflit et de ne pas s'engager. Il en a marre de la guerre, ne veut plus faire ou voir couler le sang. Parmi ses enfants (il en a sept, orphelins de leur mère, décédée quelques années plus tôt), l'aîné, Gabriel (Heath Ledger), veut, lui, s'engager, et le fait, contre l'avis de son père qu'il trouve lâche. Un jour, blessé (pas trop gravement), Gabriel rentre à la plantation familiale pour y être soigné et se reposer quelques temps avant de repartir au combat.

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Peu après, les troupes britanniques, menées par le colonel Tavington (Jason Isaacs), investissent la plantation et s'en prennent à la famille de Benjamin, tuant un de ses fils, capturant Gabriel dans l'intention de le pendre, et incendiant la maison. Fou de rage, Benjamin reprend les armes, décimant, avec deux de ses enfants (garçons et d'âge pour se battre) le bataillon ayant capturé Gabriel pour le libérer (au grand dam de Benjamin, Tavington n'est pas présent) et organisant la révolte en recrutant, pour son armée de rebelles, des volontaires. Parmi eux, son fils Gabriel, plusieurs anciens congénères de l'ancienne guerre, et un Français, le major Villeneuve (Tchéky Karyo), présent en avant-poste avant l'arrivée des hommes de Lafayette...

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Bien que long de presque 3 heures, The Patriot n'est pas ennuyeux. On a certes un ou deux passages un peu creux, mais pas plus que dans un autre film de cette durée. La réalisation de Roland Emmerich est solide, les scènes de bataille sont impressionnantes, assez sanglantes également (un soldat se fait arracher la tête par un boulet de canon, quasiment au premier plan, entre autres joyeusetés, et dans une scène, Mel Gibson ravage à coup de tomahawk le visage d'un Anglais, hors-champ, mais le sang gicle bien comme il faut ; et sur le blu-ray, il est indiqué 'tous publics' sur fond vert, à n'y rien comprendre). Le film est une bonne reconstitution de l'Amérique du XVIIIème siècle (c'est peut-être un détail, mais le drapeau utilisé dans le film, comme sur la photo ci-dessous, est le bon, celui de l'Amérique pas encore totalement formée), et il est excellemment bien interprété par de très bons acteurs. Mel Gibson est convaincant en ancien guerrier reconverti en brave père de famille pacifique obligé de se battre à nouveau par amour de ses enfants et pour en venger un. Jason Isaacs, connu essentiellement pour avoir joué Lucius Malefoy dans les Harry Potter, campe ici un méchant anthologique, une authentique pourriture qu'on a immédiatement envie de voir crever lentement, très lentement, très salement, très douloureusement, genre égorgement à la petite cuillère à café en plastique de chez McDo ou empalement sur une batte de base-ball imprégnée de piment d'espelette et de gros sel. Le regretté Heath Ledger, quasiment révélé par ce film, n'est pas dans son meilleur rôle, mais il est tout de même franchement excellent. 

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The Patriot, pour Emmerich, c'est un peu un film à part. Le mec qui, avant ça, était connu pour ses blockbusters décérébrés (Independence Day, Godzilla, Universal Soldier) livre ici un fim plus sérieux, plus structuré, moins rentre-dedans, une vaste fresque historique (même si Emmerich a pris des libertés avec la réalité des faits, selon pas mal de spécialistes). Je ne suis pas spécialiste de l'Histoire des USA de cette époque, et je me doute bien que ce n'est pas super réaliste - on parle d'Emmerich, pas de Kubrick ou de Spielberg - mais durant les presque 3 heures du film, je ne me suis pas ennuyé et j'ai trouvé le résultat vraiment plaisant, un bon divertissement (qui, commercialement parlant, marchera bien, mais pas aussi bien qu'espéré, ça ne sera pas un bide, le film a été tout juste rentable), un film qui est presque le meilleur du réalisateur, et qui, à sa sortie, l'était très clairement. Bref, franchement, bien que ça ne soit pas un chef d'oeuvre (loin de là), c'est vraiment un très bon film, à (re)découvrir. 


08 janvier 2019

Un des plus grands films catastrophe au monde

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Spoilers !

J'avoue, j'aime beaucoup, non, énormément, les films catastrophe, et j'en ai revu pas mal récemment, dont celui que j'aborde aujourd'hui pour la première fois, et au sujet duquel je me demande bien comment j'ai pu m'y prendre pour ne pas l'avoir abordé ici depuis tout ce temps. Les films de ce genre étaient très calibrés (je dis 'étaient' même si ceux qui sont faits à l'heure actuelle sont aussi calibrés, mais un tantinet moins tout de même), avec des personnages fortement stéréotypés et des acteurs en pagaille, têtes d'affiches ou seconds rôles traditionnels, mais on y trouvait toujours au moins quatre acteurs (ou actrices) connus. Soit ils avaient besoin de relancer leur carrière et dans ce cas, un film catastrophe, genre à la mode dans les années 70 (l'échec de quelques films de ce genre, en 1979/1980, entraînera la fin du genre), était idéal ; soit ils étaient déjà connus et le film pouvait jouer sur leur popularité (et eux, sur un succès de plus) ; soit ils démarraient, et dans ce cas, ça pouvait être un beau tremplin (moins fréquent). Dans le film qui nous intéresse ici, adaptation d'un roman de Paul Gallico (le scénario adapté est signé Stirling Silliphant et Wendell Mayes) et film réalisé en 1972 par Ronald Neame (aussi réalisateur du Dossier ODESSA), on trouve pas moins de sept acteurs ou actrices connu(e)s de l'époque.

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Ce film, dont j'ai abordé récemment, ici, un des deux remakes (Poseidon, fait par Wolfgang Petersen en 2006 ; l'autre remake, télévisuel, fut fait l'année d'avant le film de Petersen), c'est bien entendu L'Aventure Du Poséidon. Niveau acteurs, on a donc ici des stars de l'époque : Gene Hackman, Ernest Borgnine, Shelley Winters, Stella Stevens, Roddy McDowall, Red Buttons, Leslie Nielsen, mais aussi Carol Lynley, Pamela Sue Martin, Eric Shea, Jack Albertson et Arthur O'Connell. Chacun d'entre eux, du moins pour les têtes d'affiche, tiennent un de ces fameux rôles stéréotypés classiques des films du genre : le brave gars qui se retrouve catapulté chef des survivants, le pauv' con irascible qui conteste tout, le vieux couple qui se demande s'ils vont pouvoir continuer, le gosse énervant, sa grande soeur qui en a marre de lui, le minable, l'esseulé qui se découvre une raison d'exister... Le film, produit par Irwin Allen (qui, jusqu'à connaître de gros bides à la fin des années 70 avec notamment Le Dernier Secret Du Poséidon, sera le spécialiste des films catastrophe : il a aussi produit La Tour Infernale et L'Inévitable Catastrophe), récoltera un Oscar (en 1972, pour la chanson, aussi curieux que ça puisse paraître, car la chanson est du genre pop insipide 70's), un BAFTA (pour Gene Hackman, en 1973) et un Golden Globe (en 1973 aussi, pour Shelley Winters en seconde actrice).

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Il sera un immense succès, c'est un des premiers films du genre avec Airport (1970). Autant Airport et ses trois suites sont aujourd'hui irregardables car le premier est atrocement daté et les trois autres, bien pourris (de plus, la parodie Y'A-T-Il Un Pilote Dans L'Avion ? les a bien démontées), autant L'Aventure Du Poséidon reste, du long de ses 115 minutes, un sacré classique du film catastrophe et d'aventure, bien calibré, assez stéréotypé aussi il est vrai, mais toujours aussi plaisant en 2019 qu'en 1972. L'action se passe sur un gigantesque paquebot de croisière (c'est le "Queen Mary" qui a servi de décor pour les scènes d'avant la catastrophe) effectuant sa dernière croisière (entre New York et Athènes), le "Poséidon", le soir du 31 décembre. Au cours de la soirée du réveillon, une gigantesque lame de fond, causée par un séisme sous-marin, va retourner le paquebot comme une crêpe de la Chandeleur. Dans la grande salle de bal, c'est la panique, évidemment. Parmi les survivants, un petit groupe d'une dizaine de personnes va tenter l'impossible : gagner la coque, vers la salle des hélices (la coque y est, à cet endroit, très mince).

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Le reste des survivants préfère rester dans la salle, espérant des secours qui ne viendront pas. Peu après que le petit groupe quitte la salle, celle-ci commence à être immergée. Parmi les survivants du petit groupe : un révérend tenace (Gene Hackman), un flic de la mondaine (Ernest Borgnine) fort en gueule et sa femme ancienne prostituée (Stella Stevens), un vieux couple en route vers Israel (Jack Albertson et Shelley Winters), un mioche d'une douzaine d'années et sa grande soeur (Eric Shea, Pamela Sue Martin), un vieux beau esseulé (Red Buttons), une chanteuse (Carole Lynley) et un serveur du paquebot (Roddy McDowall). Tous vont essayer l'impossible, s'en sortir par eux-mêmes...

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Les acteurs sont excellents, tous, même si certains sont dans des rôles vraiment caricaturaux (le flic bougon, coléreux qui ne peut pas encadrer le révérend et lui conteste chaque décision ; le vieux couple attendrissant ; le vieux beau faussement minable ; l'armateur, propriétaire du paquebot, qui enchaîne, avant la catastrophe, les mauvaises décisions). La réalisation de Ronald Neame est très correcte, solide, mais ce réalisateur n'avait pas la carrure des grands et ça se sent. Au passage, c'est surtout le nom d'Irwin Allen, producteur, qui ressort plus que celui du réalisateur ! Le scénario, adapté d'un roman (que je n'ai pas lu), est efficace et ne ménage pas le suspense et l'action, tout le monde ne s'en sortira pas parmi les survivants, à vous de voir qui en regardant le film (notons l'incroyable connerie de la jaquette DVD qui indique le nombre de survivants à la fin du film - sans dire qui, évidemment -, soit 6 sur les 10 du petit groupe, bonjour le suspense un peu niqué). L'Aventure Du Poséidon est, au final, un des meilleurs films catatrophe qui soient, un jalon du genre avec La Tour Infernale de John Guillermin (produit par Allen là aussi). Dommage qu'il ne soit pas plus long, presque 2 heures qui passent trop vite... Mais bon, au moins, on n'a pas le temps de s'emmerder en regardant le film !

07 janvier 2019

"Here's Johnny !!"

Shining

Spoilers...et quelques photos un peu choc !

Ayant récemment reparlé de 2001 : L'Odyssée De L'Espace, je ne pouvais pas m'arrêter en si bon chemin. Autant continuer de parler de Stanley Kubrick, d'en reparler, plutôt. Et de revoir ses films. Aujourd'hui, c'est sur un indéniable classique que je m'attarde, un film sorti en 1980, adapté d'un des plus fameux romans d'un des plus fameux écrivains du XXème siècle : Shining, d'après Stephen King. Je suis un immense fan de cet écrivain (dont le prochain roman sort en fin de mois, au passage, avis aux amateurs qui ignoraient encore cette prochaine actualité kingienne), et Shining, sorti en 1977 aux USA (et en 1979 en France, sous le titre, à la base, de L'Enfant Lumière), est probablement un de ses meilleurs romans, et un de mes préférés. Avant de voir le film de Kubrick, j'avais déjà lu, à de nombreuses reprises, le roman de King. Aussi, imaginez donc à quel point j'avais envie, hâte, de voir le film ! Je connaissais sa réputation de classique de l'épouvante qui file les jetons, je savais que Jack Nicholson y avait une de ses meilleures prestations d'acteur (avec Vol Au-Dessus D'Un Nid De Coucou, c'est le film le plus connu de cet acteur), j'en avais vu des tas d'images, mais j'ignorais quel était le degré de réussite de l'adaptation du roman. Le film respectait-il le roman ou non ? Quelles étaient les différences ? Les détails du roman qui manquent au film ? Les détails du film qui ne sont pas issus du roman ? Live ou Memorex ? L'oeuf ou la poule ? Ce genre de choses.

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Kubrick a essentiellement adapté des romans, pour ses films. Des romans qui ne sont pas forcément des best-sellers. En fait, si on met de côté Shining, aucun des romans que Kubrick a sélectionnés pour en faire des films n'a été un best-seller. OK, Lolita de Nabokov est un roman qui se vendra très bien (et fera scandale) et est considéré comme un classique moderne. Mais on ne peut pas dire la même chose de L'Orange Mécanique de Burgess, du Barry Lyndon de Thackeray, du Merdier de Gustav Hasford (qui donnera Full Metal Jacket), de La Nouvelle Rêvée de Schnitzler (qui donnera Eyes Wide Shut) et encore moins du (sans doute jamais traduit en français) Red Alert de Peter George qui a servi de base pour Docteur Folamour. Kubrick adorait lire, et quand il avait fini un film, il se lançait dans des marathons de lecture, lisant tout et n'importe quoi, des nouveautés comme des vieilleries, avec pour espoir de tomber sur un truc intéressant à adapter, quelque chose dont il serait susceptible de faire un film intéressant. C'est ainsi qu'il est tombé, soit par hasard, soit par recommandation d'un proche, sur le roman de King, en 1977. Apparemment, le roman venait tout juste d'être publié. Kubrick sentira qu'il pouvait faire quelque chose à partir de ce roman qu'il jugera, cependant du genre passable (bonne histoire, saisissant, mais juste correctement écrit, selon lui). 

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Kubrick engage, comme co-scénariste (avec lui), une écrivaine américaine spécialiste du roman gothique, et professeure d'université sur ce sujet, Diane Johnson. Les deux vont s'entendre à merveille et adapter en scénario de film le roman de King, après avoir obtenu de lui l'autorisation d'adapter le roman (qui fut son troisième, et le film, la deuxième adaptation de son oeuvre). Apparemment, Kubrick envisagera dès le départ de donner à Jack Nicholson le rôle principal, aimant beaucoup cet acteur (il en parlera à l'époque comme du Spencer Tracy de sa génération) avec qui il voulait déjà collaborer sur son projet avorté de 1970 Napoléon. Nicholson aurait évidemment eu le rôle-titre. Pour le rôle de Wendy, femme de Jack, décrite dans le roman comme une belle blonde, Kubrick choisira Shelley Duvall, actrice fétiche de Robert Altman qui l'a révélée (et il me semble qu'elle n'avait, à l'époque, quasiment joué que dans des Altman), qui est le polar opposite du personnage du roman : brune, un peu gauche, pas très séduisante, un peu étrange avec son regard vaguement ahuri. Selon Kubrick, jamais Wendy, telle que décrite dans le roman, ne resterait avec un mec tel que Jack Torrance, elle mériterait mieux. Aussi, il fallait un personnage féminin moins glamour que dans le roman. C'est son opinion. Shelley Duvall est juste excellente dans le rôle (elle souffrira pendant le tournage), mais ce n'est pas forcément elle qui était, je pense, la plus parfaite pour jouer Wendy. Le petit garçon qui joue Danny, et qui s'appelle Danny Lloyd, est absolument parfait. Rien à dire. Scatman Crothers, qui joue Hallorann, est excellent, et fut engagé sur recommandation de Nicholson, lequel est, ici, juste bluffant. Voilà pour la distribution. 

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La réalisation ? C'est un Kubrick, c'est donc parfait. Voilà pour la mise en scène, donc.

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L'adaptation ? Ah, là, par contre, il y à des choses à dire. Et pas de très gentilles choses. Je vais être clair : je suis fan de King, et fan de Kubrick, je révère les oeuvres de ces deux personnes. J'avais, comme je l'ai dit, hâte de voir le film, et le jour où je l'ai enfin vu, putain, mon slibard tenait tout seul, je ne vous dis que ça. J'étais aussi excité qu'une tondeuse à gazon face à une chevelure de hippie. Et au fil du visionnage des 115 minutes du film (par la suite, bien après, j'ai eu la chance de voir aussi la version longue, américaine, de 145 minutes, version que j'aimerais beaucoup voir sortir en DVD ou Blu-ray en France, mais ce n'est toujours pas le cas et ne le sera sans doute jamais), j'ai déchanté. Que dire ? Le film est génial, il fout les chocottes bien comme il faut (sa bande-son qui entremêle Penderecki, Lygeti, Bartok et un score original de Wendy Carlos et Rachel Elkind n'y est pas pour rien), on ne s'emmerde pas une seule nanoseconde, mais...son scénario ne respecte vraiment pas le roman. Stepen King s'avouera trahi, et dira pas mal de méchancetés sur Kubrick, Diane Johnson (qui, de son côté, dira du roman qu'il est moyennement écrit, et que King souffre de loghorrée, il en rajoute, en fait des tonnes ; qui a écrit des best-sellers ? Lui ou elle ? Qui se souvient d'elle pour autre chose que sa collaboration avec Kubrick ?) et sur le film. Il en fera même une nouvelle adaptation, en 1997, un TVfilm en trois parties, réalisé par Mick Garris, un film aux effets spéciaux limités et à l'interprétation pas toujours parfaite, mais qui respecte bien mieux le roman. Il a aussi écrit, en 2013, une suite, Docteur Sleep, mais je m'égare (du Nord).

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Selon King, et je suis d'accord avec lui, le film n'est pas une bonne adaptation en partie à cause de l'interprétation de Nicholson. J'ai dit plus haut qu'il était bluffant dans Shining, et putain, oui, il l'est. Mais King a raison quand il dit que Nicholson semble un peu fou dès le début du film, alors que dans le roman, dans l'histoire tout simplement, son personnage devient fou à cause du pouvoir maléfique de l'hôtel Overlook. Le personnage est un peu torturé dès le départ (dans le roman, on apprend que Jack Torrance est un ancien alcoolo, viré de son boulot de professeur d'université suite à un dérapage de trop, et il a même, autrefois, levé la main sur son enfant, un soir de beuverie, regrettant amèrement ce geste), mais dans le film, les mimiques de Nicholson (entretien d'embauche), ou son visage au contraire un peu fermé (dans la voiture) peuvent laisser penser qu'il a un petit vélo dans la tête avant même que les festivités glauques ne démarrent. Ce qui fausse la donne. Comment penser en effet que c'est l'Overlook Hotel qui le rend dingue s'il le paraît déjà au début ? 🎶 C'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup.🎶 Autre point qui diffère totalement entre le roman et le film : la chaudière. Dans le roman, Jack se fait rappeler, par le patron de l'hôtel, Stuart Ullman (qui, dans le roman, est un connard, contrairement au film où Barry Nelson le campe d'une manière très affable, dans une scène d'entretien qui, au passage, sonne très faux, quasiment publicitaire, ce qui est sans doute voulu comme tel), d'entretenir l'antique chaudière du sous-sol, faute de quoi, elle explose et boum, plus d'hôtel. Ce qui finit par arriver à la fin du roman. Dans le film, on oublie. En même temps, l'hôtel, dans le roman, est assez ancien. Dans le film, il a été conçu à la même époque que dans le roman, début XXème siècle, mais semble être, au contraire, un bâtiment assez moderne. Je dois dire que son architecture ne le rend pas très propice à une hantise ! Enfin, parmi les (nombreuses) différences, le traitement réservé à Hallorann. Dans le film, c'est pour le moins expéditif, limite bâclé. 

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Bref, j'ai, au début, au cours de mes premiers visionnages, passé de sales quarts d'heures à voir à quel point Kubrick et (grrrr) Johnson (grrrr) avaient massacré le matériau de base. Les qualités du film, car il en a des tonnes aussi, me passaient au-dessus de la tête, pire, je m'en foutais. J'étais presque à clamer haut et fort, sur tous les toits de ma ville, que c'était un mauvais film. Hé ouais ! Ben non, en fait, ç'en est pas un ! Du tout ! Shining est en réalité un chef d'oeuvre, mais du genre irritant. Je l'ai d'abord franchement détesté, puis de moins en moins, puis aimé de mieux en mieux, et si le film n'est pas mon préféré de Kubrick (et ne le sera sans doute jamais), c'est en revanche un de mes films d'épouvante préférés, dans le genre, on a rarement fait mieux. Dès les premières images, ces vues montagneuses (avec une route de crète sur laquelle roule la voiture de Nicholson prises par hélicoptère avec la relecture du "Dies Irae" par Wendy Carlos et Rachel Elkind en bande-son, on est pris de frissons. Pourtant, on ne voit que de la montagne, belles images, mais l'ensemble est saisissant. Claustrophobique malgré l'étendue du panorama. Cabin fever. Et la suite du métrage est du même acabit, par la grâce d'un montage habile et d'une réalisation serrée, par la magie d'une bande-son étourdissante et d'une interprétation au cordeau, Shining est un film flippant de chez flippant de chez flippant de chez flippant. De chez flippant. De chez qui ? Flippant. 

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Un film codé, aussi, qui regorge(rait) de messages, de pistes, d'indices, de sens cachés. Je vous conseille le visionnage du documentaire Room 237, qui parle du film et de ses secrets. Tout ce qui est raconté dans ce documentaire non-officiel (non approuvé par les ayants-droits de Kubrick) n'est pas fiable, loin de là (celle sur le programme spatial est même embarrassante, surtout pour celui qui l'énonce et qui semble y croire), mais certaines théories, comme celle de l'hommage aux Indiens (de nombreux motifs graphiques des décors sont de style indien, notamment) ou celle en hommage à la Shoah, sont des plus intéressantes. Sans oublier les invraisemblances laissées dans le film. Comment expliquer la présence du labyrinthe de buis, gigantesque, et situé à côté de l'hôtel, quand on ne voit absolument pas ce labyrinthe sur les vues aériennes de l'hôtel au début du film ? Et cette chaise (photos ci-dessus, prises par capture DVD, au cours de la même scène, avec un plan sur Shelley Duvall qui les sépare dans le film) qui, d'un plan à l'autre, disparaît...et réapparaîtra dans le plan suivant ? Erreur de continuité (si c'est le cas, de la part de Kubrick, c'est des plus étonnants) ou manière comme un autre de dire que rien, dans l'hôtel, n'est normal ? On peut aussi citer ce passage où Danny, sur son tricycle, passe apparemment du rez-de-chaussée (ou d'un entresol) à un étage, d'un couloir à l'autre, tout en roulant sur du plat. Ou le bureau de Ullman, avec cette fenêtre qui donne sur l'extérieur, alors que ledit bureau, putain de Dieu, est au centre du lobby, et ne devrait donc pas posséder de fênêtre, ses quatre murs sont 'aveugles' ! 

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On le voit, Shining ne se laisse pas révéler d'un coup, il cache pas mal de choses, certaines resteront sans doute à jamais cachées, et c'est tant mieux. Je n'ai toujours pas parlé de l'histoire, Ce  qui est sans doute, après 7 paragraphes bien remplis, une sorte de record sur le blog, mais est-ce utile de rappeler de quoi ça parle ?

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Oui ? OK, je m'incline.

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Jack Torrance est un écrivain au chômage. Il vient d'obtenir un boulot, gardien d'hiver pour un prestigieux palace situé dans le Colorado, en pleine montagne, l'Overlook Hotel. Le palace ferme pour l'hiver (les conditions météo faisant que les routes sont fermées, bloquées par la neige). Jack s'y installe avec sa femme Wendy et leur fils de 4 ans (environ), Danny, lequel est possesseur d'un pouvoir psychique (ignoré de ses parents), le Shining (ou Don, dans le roman en VF), il voit des choses du futur ou du passé, peut communiquer par télépathie. Avant de partir pour l'hôtel, Danny a, par le biais de son 'double imaginaire' Tony, une vision terrifiante, des flots de sang provenant d'une cage d'ascenseur. Jack, de son côté, au cours de l'entretien d'embauche, apprend qu'un précédent gardien a, il y à de celà quelques années, tué sa famille (une femme et deux filles jumelles) à coup de hache avant de se suicider, victime du mal des montagnes (cabin fever). Jack ne s'en affole pas, il compte écrire durant son temps libre. Ils arrivent à l'Overlook, Danny fait la connaissance, le jour de fermeture, avec Hallorann, chef cuisinier du palace, qui possède lui aussi le Shining et lui en parle. Il lui dit de ne pas avoir peur de l'hôtel car il s'y passe des choses parfois curieuses. Il lui dit aussi de rester à l'écart de la chambre 237 (217 dans le roman, mais ce fut changé car l'hôtel ayant servi pour les vues aériennes avait une chambre 217 et craignait qu'à la suite du film elle ne fut plus occupée par des clients craintifs se souvenant du film ; mais ils n'y avait pas de chambre 237, en revanche).

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Le début du séjour prolongé (tout l'hiver et une partie du printemps : jusqu'au 1er mai) se passe bien. Mais Danny a parfois des visions étranges : un couple de petites filles jumelles survenant au détour d'un couloir, une balle qui roule vers lui et qui semble venir de nulle part... Un jour, la chambre 237 est, devant lui, ouverte. Il entre, et en sort traumatisé, le cou meurtri, tandis que Jack, de son côté, cauchemarde qu'il tue Wendy et Danny. Apercevant leur gamin avec le pull déchiré et des marques au cou, Wendy pense que c'est Jack qui l'a frappé, ce dernier s'en défend, vous pensez bien, et puis, ce n'est pas lui, il était en plein cauchemar devant sa machine à écrire dans le grand hall. Mais Wendy sait bien qu'ils ne sont que trois dans l'Overlook, et que ce n'est pas elle, donc, forcément... Mais alors que Jack se barre, écoeuré et énervé, dans le bar de l'hôtel (pas pour se bourrer la gueule, le bar est totalement vide, mais pour s'isoler et faire comme si), et découvre que le bar n'est pas vide car le barman, Lloyd (Joe Turkel), s'y trouve bel et bien et lui sert un bourbon (fictif, mais réconfortant), Wendy surgit dans le bar en pleurant, lui affirmant que selon Danny, c'est une femme se trouvant dans la salle de bains de la chambre 237 qui l'a agressé. Jack, qui refuse d'y croire, s'y rend, et va découvrir l'indescriptible, une femme, assez jeune, belle, nue, dans la baignoire, qui sort, l'enlace, il est à la fois effrayé et aux anges...mais elle se transforme en une vieille peau fripée et décomposée, abominable. Jack s'enfuit, et devant Wendy, affirme qu'il n'y avait rien du tout. 

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A partir de là, tout part en couilles de castor bulgare en t-shirt mauve à pois verts, ils sont piégés par la neige, et Jack va lentement mais sûrement sombrer dans la folie, les fantômes de l'hôtel, vraiment pas gentils, vont essayer de faire avec lui ce qu'ils avaient réussi à faire avec le précédent gardien, Grady, celui qui a exterminé sa famille façon Castorama avant de faire sauter la tête. Un soir, Jack se rend dans la salle de réception de l'Overlook, y entendant du bruit, et il va tomber sur une soirée costumée. Il boit un coup au bar, et se rendant dans la salle, percute par inadvertance un  serveur qui s'excuse de ui avoir renversé un truc sur la veste et l'emmène aux toilettes pour le nettoyer. Cet homme lui dit s'appeler Grady (Philip Stone), Jack lui demande si ce n'est pas lui qui a tué sa famille et était gardien, Grady lui dit que non, Jack a toujours été le gardien ici, et au sujet de sa famille, il faudrait bien qu'il pense à la corriger un peu, Danny et Wendy deviennent ingérables. Au sujet de Danny : ce dernier, sentant bien que son papa ne va pas tarder à leur faire du mal malgré lui, appelle de toutes ses forces Hallorann, par la pensée. En Floride pour ses vacances, il sent le message, va tenter de les joindre par téléphone, mais les lignes sont coupées et la radio de l'hôtel ne marche pas ou plus. Alors il prend la route. Pendant ce temps-là, à l'Overlook, Jack surprend Wendy qui lisait ce qu'il venait de taper à la machine, des dizaines de pages avec une seule et même phrase répétée à l'infini, All work and no play makes Jack a dull boy (en VF, le sous-titrage dit "Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras", mais il aurait mieux fallu traduire pour de bon la phrase, ce qui donnerait "Travailler sans se divertir rend Jack triste sire"). Il y à un jeu de mots dans la phrase, car dans le roman (cette scène y est absente, au passage), Jack tente d'écrire une pièce de théâtre (play, en anglais). Bref. Jack surprend une Wendy affolée, armée d'une batte de base-ball pour se défendre contre un éventuel intrus, et il va la provoquer, lui tourner autour en lui criant dessus, surtout quand elle va commencer à lui parler de quitter les lieux, pour Danny. Alors qu'elle monte les escaliers à rebours tout en se protégeant avec la batte, elle finit par l'assommer avec et l'enferme, inanimé, dans la réserve de la cuisine. 

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Le soir, Danny, à moitié en transe, se met à hurler, d'une voix de canard (la voix de 'Tony'), Redrum, redrum, l'écrivant même sur la porte de leur chambre, et réveillant Wendy. Voyant le mot sur la porte, dans le reflet du miroir, elle lit murder et envoyant son fils les yeux révulsés, elle panique. Au même moment, alors que Hallorann est sur la route dans un snowcat, Jack est libéré de la réserve par l'hôtel, sous la promesse qu'il va corriger sévèrement son fils et sa femme (sous-entendu...). Il va alors se rendre vers leur chambre, défonçant la porte à coup de hache. Wendy et Danny se cachent dans la salle de bains, elle fait passer le gamin par la fenêtre pour qu'il se cache ailleurs tandis qu'elle parvient à repousser l'assaut de Jack en le blessant légèrement avec un couteau. Entendant du bruit en bas (Hallorann est arrivé et appelle), il descend et le tue à la hache (quand je disais plus haut que le sort réservé à ce personnage, dans le film, était assez expéditif ; dans le roman, Hallorann survit à la fin). Danny s'enfuit au dehors, en direction du labyrinthe de buis, poursuivi par ce qui, autrefois, était Jack mais n'est plus qu'un pantin commandé par l'Overlook. Une poursuite dans le labyrinthe enneigé, illuminé par des spots (mais en pleine nuit) survient alors, le gamin a l'idée de génie d'effacer ses traces, à un moment donné, pour fausser la donne et parvient à s'enfuir, laissant un Jack désorienté et totalement fou errer dans le dédale, tandis que Danny et sa mère partent avec le snowcat de Hallorann. Le lendemain, on voit le corps gelé de Jack, et, dans le lobby de l'hôtel, une photo prise le 4 juillet 1921, dans la salle de bal de l'hôtel. Au premier plan, Jack, souriant, entouré d'autres fêtards. L'Overlook l'a englouti et nul doute que parmi les fantômes, il y en aura désormais un de plus...

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Film magistral malgré une adaptation des plus tronquées (dans le roman, on parle pas mal de Tromal, Redrum en anglais, ce qui fait qu'on s'habitue au terme et qu'on s'attend à ce que ça fasse partie de l'intrigue ; dans le film, Redrum, ce mot, seriné par Danny, surgit d'un coup, mis à part deux flashes rapides, et on est pour le moins interloqué, ce demandant ce que ça veut dire et d'où ça vient), Shining est une tuerie de film d'épouvante, un des films les plus flippants que je connaisse. Bien plus terrifiant que d'autres classiques du genre tels L'Exorciste (en revanche, le troisième opus de la série, L'Exorciste, La Suite, que j'ai abordé ici récemment, est bien angoissant) ou La Malédiction. Qui sont de super bons films, des films géniaux même, mais pas des films qui vous retournent le slip de peur. Le montage, serré, y est pour quelque chose (quand Danny aperçoit les deux petites filles jumelles au détour d'un couloir, gros sursaut de peur ; et quand il les voit, et nous aussi, avachies, mortes, dans un couloir gorgé de sang, le temps de deux-trois images quasi subliminales, avec en fond sonore Penderecki et une voix disant Come play with us, Danny, on est vraiment pris de peur), mais la musique aussi. Ces thèmes musicaux, soit composés pour le film soit (essentiellement) utilisés par Kubrick, sont monumentaux et cadrent parfaitement avec le film. Des musiques contemporaines, abstraites, cauchemardesques, stridentes ou sournoises. J'ai enfin réussi à me procurer un vinyle d'époque de la bande originale du film (pochette jaune reprenant l'affiche originale conçue par Saul Bass), lequel album, j'ignore pourquoi, est difficile à trouver, et jamais à bas prix (ou alors, en état pourri). J'ai personnellement dû dépenser presque 50 €, je ne le regrette pas, mais ça fait tout de même une somme. Mais comme je l'ai dit, je ne le regrette pas, car dans le genre ("Lontano", "De Natura Sonoris", "Rocky Mountains", "Awakening Of Jakob"), on a rarement fait mieux, comme musique d'ambiance et de film d'angoisse, que celle de Shining.

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De même qu'avec ses séquences cauchemardesques (le labyrinthe, les flots de sang dans l'ascenseur, les jumelles, Nicholson errant, titubant et armé d'une hache, dans le lobby, la femme de la chambre 237 hurlant de rire...), on a rarement fait mieux, dans le genre, que ce film. Inoubliable. Et ce, en dépit de la trahison vis-à-vis du roman. Comme je l'ai dit plus haut, en 1997, Stephen King (qui partage avec le bourreau de son roman les mêmes initiales) fera faire une deuxième adaptation, en TVfilm en trois parties (plus de 4h en tout), réalisé par Mick Garris (un fidèle : on ne compte plus les adaptations télévisuelles en mini-séries qu'il a faites de l'univers de King), baptisée, en VF, Shining, Les Couloirs Du Temps. On y trouve Stephen Weber, Rebecca De Mornay, Melvin Van Peebles, Elliott Gould, Pat Hingle. Les acteurs sont pas mal (même si Weber ne parvient pas à faire oublier Nicholson, il est plus proche du personnage tel que décrit dans le roman, psychologiquement parlant), l'adaptation respecte très bien le roman, l'hôtel filmé en extérieurs est même le Stanley Hotel qui servira de modèle à King pour son Overlook...mais les effets spéciaux sont un peu moyens, la réalisation et le montage ne sont pas aussi immenses (évidemment) que dans le film de Kubrick, et 4h30, c'est long. Bref, une meilleure adaptation, mais sans aucun style. En comparaison, le film de Kubrick n'adapte pas très bien le roman, mais quelle classe il a, en revanche ! Avec le recul, même si j'adore la version de Mick Garris, c'est vers celle de Kubrick, malgré tout, que je me tourne.

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Et pour finir avec ce long article, sachez que la version longue de Shining (le film de Kubrick), qui rajoute une demi-heure, propose des séquences situées, au début, dans l'appartement des Torrance (avant qu'ils ne partent pour l'Overlook), notamment une séquence avec un médecin (l'actrice la jouant, Anne Jackson, est créditée au générique du film, y compris la version définitive de 115 minutes, malgré tout). On a aussi une séquence entre Hallorann et un garagiste lui louant le snowcat (là aussi, l'acteur, Tony Burton, bien que n'apparaissant pas du tout dans la version courte, est crédité au générique), une séquence montrant Wendy et Danny regarder Un Eté 42 à la TV, et surtout le final du film, Wendy et Danny à l'hôpital, avec Ullman qui leur rend visite et remet à Danny une petite balle jaune, celle qui, dans le film, surgit de nulle part dans le couloir. Ce qui signifie qu'Ullman n'ignore absolument pas ce qui se passe dans son hôtel... Cette version longue, sortie uniquement aux USA (Kubrick fera raboter le film de cette demi-heure à la dernière minute avant la sortie internationale), existe en DVD et BR aux USA, et il existe une édition BR italienne qui la propose, avec des sous-titres français. Mais pas de DVD ou BR français pour le moment. Ayant vu les deux versions, je dois dire que mon coeur balance plus pour la courte, j'y suis plus habitué, mais la version américaine est vraiment très réussie et intéressante. A noter que si vous voulez regarder, j'en parle bien plus haut, le documentaire Room 237 qui parle du film de Kubrick et de ses nombreux messages apparemment cachés, c'est la version longue qui est prise comme référence, pas la courte... Voilà, pour finir, je pense avoir tout dit. Ce film est un monstre du genre !

06 janvier 2019

Documentaire de fiction autobiographique

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Ce film n'est, hélas, pas des plus connus, j'espère donc que vous le découvrirez en lisant cet article, que vous aurez envie de le voir, et qu'il vous enchantera comme il l'a fait pour moi. Si vous aimez l'oeuvre de Federico Fellini, d'un autre côté, il se peut que vous connaissiez ce film, que vous l'ayez vu, ou du moins que vous en ayez entendu parler. Ce film date de 1970 et est assez à part dans la filmographie imposante (et riche en classiques) de l'Italien. Ce n'est pas un film, mais un documentaire. Mais ce n'est pas qu'un documentaire : il contient, en fait, trois parties distinctes (d'ailleurs, l'édition DVD chez MK2 montre le chapitrage en trois colonnes, une par partie) : une partie de fiction autoiographique à la Amarcord, une de documentaire et une de...spectacle filmé, on va dire ça. Malgré qu'il soit constitué de trois parties (la seconde et la plus longue), le film n'est pas long du tout, il dure 90 minutes en tout et pour tout. Il s'appelle Les Clowns. Avec Fellini Roma et Amarcord (tous deux faits juste après), c'est mon préféré de Fellini, et probablement un de ses plus beaux films. Film qui sera d'ailleurs unanimement qualifié de réussite, de magnificence visuelle et poétique, à sa sortie. Bien que documentaire, ce film bénéficie de la participation, dans leurs propres rôles, de Fellini lui-même, d'Anita Ekberg, Pierre Etaix, Annie Fratellini, Alvaro Vitali. Pour ce dernier, il n'est en fait pas vraiment dans son propre rôle, mais dans le rôle d'unpreneur de son du nom d'Alvaro !

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Les Clowns (I Clowns en italien) est un film vraiment à part dans la filmographie de Fellini. Comme je l'ai dit, il est en trois parties, de durée fort inégales (la première dure moins de 20 minutes ; la dernière en dure 20 ; celle du milieu dure quasiment une heure). La première est autobiographique et se passe dans les années 30/40. On y voit un petit garçon qui, se levant en pleine nuit car il a entendu du bruit dans la rue, aperçoit un cirque itinérant en train de s'installer, on dresse le chapiteau. Le lendemain, il assiste au spectacle : dressage de lions, acrobates, cracheurs de feu, acrobaties équestres, freaks, et les fameux clowns qui, en pagaille, alternent les pitreries. Au point de faire pleurer le gamin qui, la voix-off (celle de Fellini) l'expliquant, a eu peur des clowns. D'ailleurs, les clowns font souvent peur aux enfants, dans un premier temps, leurs maquillages et attitudes exagérées pouvant être assez impressionnants. Fellini, ensuite, nous montre, toujours dans cette première partie, ce qui, dans son village (il est né en Emilie-Romagne, dans la campagne italienne, à Rimini, mais ce n'est pas forcément là que ça se passe et a été tourné), pouvait faire office de clowns : une religieuse naine ; un chef de gare moqué de tous et très enclin aux coups de gueule homériques ; un vétéran de la Grande Guerre, mutilé, et son infirmière fan de Mussolini ; un poivrot un peu paumé, qui n'a pas la lumière dans toutes les pièces de son cerveau, et qui se prend pour un héros de guerre ; les alcoolos du village ; les séducteurs du village qui se prennent pour des Rudolf Valentino d'opérette ; et le fameux idiot du village, évidemment, qui cherche tout le temps à lutiner les paysannes qui le grondent en rigolant à moitié. Cette première partie est très proche de ce que Fellini nous montrera dans Amarcord en 1973, film autobiographique sublime (son meilleur film), on y retrouvera pas mal de ce genre de personnages.

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Dans la seconde partie (on y passe d'un coup, sans carton annonciateur), on voit Fellini et son équipe, réduite, de tournage (caméraman, preneur de son, secrétaire chargée de lire, à l'écran, des notes...), en train de préparer le film, puis de le filmer, essentiellement en France, à Paris et ses environs, afin de remonter la source des clowns de cirque. Fellini fait intervenir, durant la quasi-heure de cette seconde partie, diverses personnes qu'il rencontre, notamment Tristan Rémy, un spécialiste. Une séquence montre Anita Ekberg devant une cage à tigres, une tigresse devant d'autres fauves, immortalisée en train de rire, filmée par un Fellini sans doute amusé de la rencontre. A Paris, on découvre le Cirque d'Hiver, on voit Bouglione observer, d'un oeil impassible, le numéro d'un jeune artiste et de sa jeune assistante (on apprend qu'il s'agirait d'une des filles de Chaplin, incognito) ; Fellini et sa troupe rencontrent diverses légendes de la clownerie de cirque : la famille Fratellini et le réalisateur Pierre Etaix (marié à Annie Fratellini), George Loriot (qui joua Tournesol dans le premier film avec acteurs adapté de Tintin, pour l'anecdote), Bario (qui, dans un premier temps, refuse de se montrer, trop nostalgique pour parler, et qui finit par céder, moment assez touchant). On apprend les codes de la clownerie (le clown blanc et l'auguste ; le premier est sérieux, le second ne fait que des conneries et le clown blanc est son souffre-douleur et son bourreau en même temps), on apprend qu'un vieux clown est mort de rire en assistant au spectacle du fameux clown noir Chocolat (dont on tirera un film avec Omar Sy) et on découvre des images d'archives sur un des plus grands clowns d'antan, Rhum, mort jeune. 

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Dans la dernière partie, qui est personnellement celle que j'aime le moins, Fellini organise un grand spectacle de clowns d'une vingtaine de minutes, dans un décor de chapiteau de cirque, autour de la mort du clown. C'est un fait, les clowns d'antan ne font plus trop recette, remplacés par d'autres qui font rire autrement. On a donc, dans cette dernière partie, un grand spectacle délirant de clowns éplorés autour de la dépouille d'un clown, enchaînant les pitreries l'une après l'autre. C'est du Fellini, donc ça part dans tous les sens, mais pour le coup, c'est peut-être un peu longuet, malgré que ça ne dure que 20 minutes. Mais c'est un final certes original et rendant bien hommage à la profession, mais un peu décevant quand même, un peu faiblard. Il n'empêche que Les Clowns est un remarquable documentaire, ou essai, ou docufiction, enfin, un remarquable film, dans lequel Fellini nous parle de sa fascination pour le cirque, fascination partagée par bon nombre de personnes, sinon, le succès des émissions sur le cirque, à la TV, ne s'expliquerait pas. Un film sublime, pas totalement parfait, mais totalement fellinien, à voir absolument. 

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05 janvier 2019

La folie comme refuge

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Spoilers ! Tout le film est raconté !

Dans la filmographie de John Carpenter, il y à trois films que le réalisateur qualifie lui-même de 'trilogie de l'Apocalypse'. Trois films qu'il relie entre eux par leurs ambiances nihilistes, mais qui sont, mis à part ça, totalement différents les uns des autres (aucun personnage récurrent, aucune allusion à l'un de ces films dans les autres...). Le premier de ces films est The Thing, de 1982, son remake d'un film de SF des années 50, un film avec Kurt Russell, monumental film d'horreur bien gore qui, à sa sortie, sera un bide commercial, n'étant devenu culte que bien plus tard. Le deuxième de ces films est Prince Des Ténèbres de 1988, quasiment métaphysique, un film avec Donald Pleasence, monumental film d'épouvante bien flippant qui, à sa sortie, sera un bide commercial, n'étant devenu culte que bien plus tard. Et le troisième de ces films est L'Antre De La Folie, de 1995, inspiré par les oeuvres de Lovecraft et Stephen King, un film avec Sam Neill, monumental film d'angoisse bien prenant qui, à sa sortie, sera un bide commercial, n'étant devenu culte que bien plus tard. Vous vous demandez peut-être quels films de Carpenter ont bien marché à leur sortie, vu que ces trois films ont été des échecs commerciaux, et que l'on peut en citer d'autres (Ghosts Of Mars, Les Aventures De Jack Burton Dans Les Griffes Du Mandarin, Vampires) ? Hé bien, La Nuit Des Masques a cartonné, et je crois que Christine, Fog et Starman ont bien marché. Mais il est vrai que dans l'ensemble, la filmographie de Carpenter, peu commune et assez 'indépendante' (jamais aucune grosse production blockbuster ne lui sera confiée), est synonyme de bides commerciaux.

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Mais la majeure partie de ses films sont, vraiment, réussis. Celui-ci, de 1995, sorti la même année qu'un autre film de Carpenter (le remake, bien raté, du Village Des Damnés), est donc interprété par Sam Neill, mondialement connu pour avoir joué le rôle d'Alan Grant dans Jurassic Park et Jurassic Park III. On y trouve aussi Julie Carmen, David Warner, Jürgen Prochnow (acteur allemand loin d'être médiocre, mais ayant eu la malchance de jouer dans plusieurs films ayant été de bons gros bides commerciaux : Dune, La Forteresse Noire, ainsi que l'épouvantable Terminus avec Johnny Hallyday ; il a aussi joué un rôle secondaire dans le très sous-estimé Da Vinci Code de Ron Howard), Charlton Heston (dans un rôle secondaire, l'acteur se faisait déjà rare à l'époque), Bernie Casey et, dans un petit rôle, et ce fut son premier, Hayden Christensen, futur Anakin Skywalker dans deux Star Wars. Si Sam Neill est, comme je l'ai dit, mondialement connu pour avoir joué dans deux des Jurassic Park (clairement le rôle qui l'a popularisé), il ne faut pas non plus oublier qu'il a aussi joué dans La Malédiction Finale (troisième volet de la série horrifique), où il jouait l'Antéchrist adulte, ou bien dans Possession de Zulawski, Calme Blanc de Noyce, La Leçon De Piano de Jane Campion ou A La Poursuite D'Octobre Rouge de McTiernan. Cet acteur néo-zélandais sait clairement se diversifier. 

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Le film, court (90 minutes générique de fin inclus), est un des plus flippants que je connaisse, il possède une atmosphère totalement monstrueuse à la Lovecraft ou Stephen King, mais surtout Lovecraft, les fans de cet auteur culte reconnaîtront certaines de ses obsessions. L'action démarre dans le vif du sujet : un homme est amené dans un asile psychiatrique, encamisolé, il se débat et va même filer un méchant coup de pied dans les couilles d'un des infirmiers avant qu'on ne l'enferme dans une cellule capitonnée. Il clame qu'il n'est pas fou. Cet homme s'appelle John Trent (Sam Neill). Peu de temps après qu'il soit arrivé à l'asile, un psychiatre, Wrenn (David Warner), vient le voir, entre dans sa cellule pour parler avec lui. Trent a dessiné, sur toutes les parois de sa cellule capitonnée, sur ses vêtements et sa peau, sur sa couchette aussi, des croix, avec un crayon de papier. Il va lui raconter son histoire, et semble très sensé, malgré les croix. Le reste du film est un gigantesque flash-back. Trent travaillait dans les assurances et était chargé de débusquer les fraudeurs. Un jour, dans un restaurant, lui et un collègue se font agresser, et manquent de se faire tuer, par un cinglé armé d'une hache, au visage immonde (un peu déformé, yeux révulsés) qui lui demande s'il a lu Sutter Cane et lève sa hache avant de se faire descendre par deux flics. Peu de temps après, il est appelé par une maison d'édition, qui s'avère être celle qui édite les romans de Sutter Cane, un écrivain de romans horrifiques connaissant un immense succès depuis des années, mais que Trent n'a jamais lu, n'aimant pas les romans de ce genre et suspectant que c'est sans doute de la mauvaise littérature.

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L'éditeur de Cane, Jackson Harglow (Charlton Heston), est inquiet : le prochain livre de Cane doit sortir prochainement, mais aussi bien l'auteur que le manuscrit ont disparu. Trent est chargé de retrouver les deux, en tout cas le manuscrit, qui appartient à la maison d'édition, qui se doit de le publier. Trent apprend par ailleurs que le mystérieux tueur à la hache n'était autre que l'agent de Cane, qui est devenu fou et a massacré sa famille avant de faire ce qui a été résumé plus tôt. Trent accepte la mission, bien que peu motivé, et une lectrice professionnelle travaillant pour la maison d'édition, Linda Styles (Julie Carmen), va lui servir d'accompagnatrice, lui explique qu'elle est la seule, avec feu l'agent de Cane, à lire les manuscrits avant publication, et que les écrits de Cane, sur des personnes dites psychologiquement fragiles, peuvents avoir des conséquences dramatiques. Trent décide d'acheter les précédents romans de Cane pour se familiariser avec son univers, les lit, et va faire rapidement quelques cauchemars bien sentis, étant happé par l'univers glauque et terrifiant (plus qu'il ne se l'imaginait) de l'auteur. Il découvre aussi que c'est Cane qui illustre les couvertures de ses romans, et que chacun d'entre eux possède des lignes qui, alignées correctement les unes contre les autres (pour s'en rendre compte, Trent découpe les couvertures), forme les contours de l'Etat du New Hampshire et localisent la ville fictive de Hobb's End où se passent divers romans de l'auteur. Pour Trent, c'est évident : cette ville existe bien que ne trouvant sur aucune carte, et Cane et son manuscrit s'y trouvent. Il part avec Linda, en voiture. Sur la route, ils manquent de renverser un gamin sur un vélo, qui s'avère être, en fait, un vieillard au visage troublant, qui disparaît dans la nuit sur son vélo, apparemment indemne. Peu après, en roulant, de nuit, dans le New Hampshire (c'est Linda qui roule, Trent s'est endormi), Linda sent qu'elle a quitté la route mais ne ressent aucun choc. Elle continue de rouler malgré elle, terrifiée, et finit par arriver, à la sortie d'un grand pont couvert, en plein jour, à l'entrée d'une petite ville : Hobb's End, sans savoir comment elle a bien pu parvenir à arriver dans un lieu apparemment fictif. 

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De fait, tout, dans la ville, ressemble à s'y méprendre (décor, personnages) aux romans de Cane. Pour Linda, ils sont dans l'univers de Cane, pas dans la réalité. Pour Trent, très pragmatique, ils sont dans une vraie ville, que c'est juste une mise en scène farfelue et lugubre pour promouvoir le nouveau roman de Cane, et que elle et Harglow l'ont gentiment piégé en l'attirant ici pour lui faire peur, quelque chose de ce genre. Linda lui avoue qu'en effet, la promotion du nouveau roman n'est pas étrangère à tout ça, mais que le fait de se retrouver à Hobb's End, ville prétendument fictive, n'était pas prévue. Se rendant à l'église de la ville (qui est telle que décrite dans les romans), Trent et Linda voient un attroupement de villageois arriver, armés, et réclamant qu'on leur rendent leurs enfants. Les portes de l'église s'ouvrent et se ferment à plusieurs reprises, faisant voir un petit garçon, puis un homme en tenue de curé (Jürgen Prochnow), que Linda dira à Trent, juste après, être Sutter Cane. Des chiens surgissent et attaquent les villageois qui s'enfuient, Trent et Linda aussi. Peu après, elle se rend seule à l'église, pour retrouver Cane, qui lui montre son dernier roman, L'Antre De La Folie. Elle le lit et devient folle. Pendant ce temps, Trent tente de fuir Hobb's End, qu'il pense toujours être une vraie ville dans laquelle on se fout de sa gueule avec des comédiens, et va  être dans l'impossibilité de fuir, se retrouvant, toujours, au volant de sa voiture, dans la grand-rue, harcelé par des villageois monstrueux et armés. Il percute sa voiture, et se réveille dans l'église, avec Linda et Cane, qui lui expliquent que les romans de Cane ont réveillé une race antique et monstrueuse de créatures qui veulent prendre possession de la Terre. Pour Cane, Trent n'est autre qu'un de ses personnages, et même le personnage principal de L'Antre De La Folie, et qu'il doit remettre le manuscrit à l'éditeur afin de favoriser la venue de ces monstres et de précipiter la fin de l'humanité. Trent refuse d'y croire, refuse même de prendre le manuscrit, mais on le force à le faire. Il voit Cane se déchirer le visage comme si c'était une page de papier, créant un portail vers la dimension des créatures. Apparaît aussi un tunnel qui, selon Cane, conduira Trent dans son univers à lui, afin qu'il apporte le roman.

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Trent traverse le tunnel, retrouve les USA normaux (la rencontre avec un jeune garçon à vélo lui apprend qu'il n'existe pas de ville du nom de Hobb's End), et dans une chambre d'hôtel, brûle le manuscrit. Le lendemain matin, à la réception de l'hôtel, l'employé lui remet un paquet kraft à son nom, avec, dedans, le manuscrit. Il le détruit. De retour à New York, il explique à Harglow tout ce qui lui est arrivé, et Harglow lui explique que Trent a été seul en mission, qu'aucune Linda Styles ne travaille pour lui. Il lui apprend aussi que le manuscrit a été livré depuis plusieurs mois, publié, et est devenu un best-seller tellement monumental qu'un film adapté va bientôt sortir. Totalement affolé, sachant bien qu'il ne faut pas lire le roman sous prétexte de devenir fou criminel, Trent erre dans la ville et, devant une librairie (une foule de gens venus acheter le roman, récemment réédité, est devant le magasin), est interpellé par un jeune homme au regard fou et au visage un peu mutant, qui lui parle de Cane. Il le tue à coup de hache et est emmené à l'asile. On retrouve la scène du début, l'entretien dans la cellule avec le psychiatre, Wrenn, qui s'en va juste après. Il pense que tout est une hallucination d'un cerveau dérangé. Le lendemain matin, Trent se réveille dans sa cellule. La porte est ouverte, il y à du sang un peu partout, tout est ravagé, il est seul. Il sort, tandis qu'une radio annonce, dans un flash d'info, que des cas de tueries de masse et de suicides surviennent un peu partout aux USA, et que des créatures monstrueuses, tentaculaires, apparaissent de ci de là. Trent, qui sait bien de quoi il s'agit, passe, en ville, devant un cinéma diffusant l'adaptation du dernier roman de Cane (le personnage principal, sur l'affiche, ressemble à s'y méprendre, à Trent, crédité, comme Linda et Harglow, comme acteurs, et le réalisateur est un certain John Carpenter) et il entre dans la salle (il y est seul) pour voir le film. Il y voit tout ce qui lui est arrivé à Hobb's End, et se rendant compte qu'il est en effet un personnage de roman. Il éclate de rire et de sanglots hystériques. 

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On retrouve dans ce film tout ce qui fait l'univers des romans de Lovecraft (une abomination indicible qui transforme les gens, dans une petite ville de Nouvelle-Angleterre) et de King (là aussi, une petite ville de Nouvelle-Angleterre, même si, dans les romans de King, c'est dans le Maine et pas le New Hampshire ; King est cité dans le film), et le moins que l'on puisse dire, c'est que les références sont parfaites. In The Mouth Of Madness est un film admirable, à voir plusieurs fois car il peut sembler un peu abscons au premier visionnage. Les acteurs sont excellents, à commencer par Sam Neill, c'est probablement un de ses meilleurs rôles et il est des plus crédibles en héros malgré lui (il n'a rien d'héroïque au départ ; ce n'est pas un antihéros non plus, juste un homme lambda qui se retrouve malgré lui dans une histoire qui le dépasse) et on s'attache parfaitement à lui, même si, quand le film démarre, on le voit d'abord comme un aliéné dans une cellule capitonnée. La réalisation de Carpenter est efficace, le scénario (de Michael De Luca) est très bien écrit. La seule chose de négative que j'ai à dire consiste dans la musique du générique de début, du hard-rock tendance hair-metal, un morceau instrumental à la Dokken ou Ratt qui, c'est le cas de le dire, ne va pas du tout avec l'ambiance générale du film et aurait mieux convenu à, disons, Invasion Los Angeles ou à un slasher bas de gamme ! Heureusement, hormis le générique de fin, ce thème musical outrancier ne revient pas dans le film, le reste de la musique est plus carpenterienne (c'est de toute façon lui qui la signe) et très proche de l'ambiance du film. Un film absolument génial, donc, un des meilleurs du réalisateur, peut-être même son dernier grand film. Malgré tout, il ne sera pas un gros succès commercial, mais certains critiques en parleront comme d'un des meilleurs films de 1995. A voir absolument, mais gaffe !, c'est totalement angoissant et le final rend fou. 

04 janvier 2019

Le meilleur film de Roland Emmerich ?

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Spoilers...

Je vais encore parler de Roland Emmerich ici, croyez-bien que j'en suis désolé (non, c'est pas vrai), et le plus drôle, c'est qu'il me reste non pas un, mais deux de ses films à aborder sur le blog. Peut-être même trois, en fait. Un de ces films finira, probablement, dans la catégorie des nanars (c'est même certain), et les deux autres n'y auront pas droit, parce que ce ne sont pas des nanars. Celui-ci est même, probablement, le meilleur film de Roland Emmerich, du moins en concurrence avec Independence Day. Il s'agit d'un film catastrophe (genre cinématographique dont j'ai vu ou revu pas mal de représentants ces dernières semaines) sorti en 2004, qui est coincé, dans la filmographie de l'Allemand fou, entre un film de guerre historique avec Mel Gibson (The Patriot) et une merde abyssale qui tente (et échoue lamentablement) d'essayer d'atteindre les tibias de La Guerre Du Feu (10 000). Ce film catastrophe de 2004, dont la sortie française fut accompagnée d'une chanson de Chimène Badi pour le promouvoir (heureusement, elle est absente du DVD/BR du film), c'est bien entendu Le Jour D'Après, film dont le titre français est une assez bonne traduction du titre original (The Day After Tomorrow), mais qui est aussi le titre français d'un film de guerre de 1965 qui n'était autre que la suite du Jour Le Plus Long. C'est aussi le titre français d'un film sud-coréen de 2017 et d'un TVfilm de 1983 de Nicholas Meyer, qui sortira en salles. Aucun autre de ces films ne possède le même titre original que le film d'Emmerich, c'est en français qu'ils sont homonymes. 

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Le film d'Emmerich est interprété par Dennis Quaid, Jake Gyllenhaal, Ian Holm, Emmy Rossum, Sela Ward, Dash Mihok, Jay O. Sanders, Kenneth Welsh, Tamlyn Tomita et Arjay Smith. Long de 125 minutes, c'est un savant mélange entre film catastrophe et d'aventures pur et simple, un film basé en partie sur un livre de 1999 parlant du réchauffement climatique et de ses probables et dramatiques futures conséquences. Bien entendu, c'est avant tout un film catastrophe hollywoodien, dont le trait est assez fortement grossi, à grand renfort d'effets spéciaux et quelques clichés, mais le film n'en possède pas moins un indéniable message : faisons gaffe à notre planète avant qu'il ne soit trop tard. Dans le film, en fait, c'est déjà trop tard, et plusieurs scientifiques, dans le monde, estiment que, dans la réalité, c'est également déjà un petit peu trop tard. L'action se passe de nos jours, bref en 2004. Le paléoclimatologue Jack Hall (Dennis Quaid) et deux de ses collègues effectuent une mission de routine (du carottage de sol) en Antarctique quand le plateau de glace sur lequel ils se trouvent se détache du reste du continent. Ils ne s'en sortent que de justesse. De retour, Hall, au cours d'une conférence internationale en Inde, et alors que le pays est en proie à un violent dérèglement climatique (il y neige comme en Scandinavie), tente d'alerter les grands de ce monde (dont le vice-Président américain, Becker, joué par Kenneth Welsh, qui campe un parfait connard arrogant) sur les dangers qui nous menacent : si la calotte glaciaire se brise, ça provoquera une réaction en chaîne qui entraînera un nouvel âge glaciaire sur la majeure partie du globe.

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Hall ne parvient pas à alerter grand monde, sauf un climatologue anglais, Terry Rapson (Ian Holm) qui a constaté que des balises situées à divers points du globe, en mer, se dérèglent suite à de brusques changements de température de l'eau (qui se refroidit violemment). Rapidement, des faits météorologiques brutaux surviennent un peu partout dans le monde (chute de blocs de glace au Japon, tornades en Californie, chutes violentes de neige...). Sam (Jake Gyllenhaal), le fils de Hall, lycéen surdoué en conflit avec son père qui vit séparé de sa mère, doit partir, avec deux de ses camarades de lycée, à New York pour participer à un concours inter-établissements. La ville est en proie à de violentes pluies, qui menacent de se transformer en inondation (les égouts commencent à déborder). Alors que le trafic aérien est interrompu et qu'il est contraint de rester à New York, un raz-de-marée monumental, haut comme la Statue de la Liberté, s'abat sur la ville. Sam et ses amis, ainsi que d'autres personnes, ont juste le temps de s'infiltrer dans la bibliothèque municipale. La chute de la température va rapidement transformer l'eau, qui a noyé la ville, en glace, et après avoir réussi à joindre, par téléphone, son père inquiet, Sam apprend qu'il ne faut surtout pas sortir, la température sera si froide qu'elle ferait geler n'importe qui. Hall promet à son fils qu'il va aller le chercher, au péril de sa vie. Le compte à rebours commence...

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Le Jour D'Après, qui marchera plutôt bien au box-office, du moins dans mes souvenirs. Les critiques presse furent probablement du genre encore un film hollywoodien à grand budget rempli d'effets spéciaux impressionnants mais au scénario basique rempli de clichés. Il est vrai que le film empile les poncifs du genre : combien de films catastrophe avez-vous vus dans lesquels il n'y avait pas d'animal de compagnie (chat, ici un chien) parmi les personnages ? Sans oublier les personnages stéréotypés : le héros sans peur prêt à risquer sa vie et que personne ne veut écouter avant que ça ne soit trop tard ; le 'puissant' tête de con qui regrette un peu tardivement de ne pas avoir suivi les conseils avisés du héros ; le fils du héros, lui-même assez héroïque (il sait de qui tenir) ; son pote issu d'une minorité ethnique ; sa copine dont il est in love et qui, tôt ou tard, risquera sa vie ; celui qui croit tout savoir mieux que quiconque et qui, on s'en doute, ne sera pas là pour assister au générique de fin du film, le sien étant survenu bien avant... Oui, The Day After Tomorrow regorge de clichés du genre, mais dans un sens, c'est ce que l'on attendait de lui. Absolument loin d'être un grand film, c'est toutefois un excellent divertissement à regarder un samedi soir, en famille ou entre amis, un film assez prenant, aux effets spéciaux franchement bien foutus et qui, contrairement à 2012 du même Emmerich (pas de suspense : le film de Emmerich que j'annonçais, en intro, aborder dans la catégorie 'nanars', c'est celui-là), contient quand même une histoire, mince mais bel et bien là. 

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Bien entendu, peu de suspense, on se doute bien que Jack Hall va sauver son fils et ses amis et autres survivants (peut-être pas tous, mais on est à peu près sûrs que la petite amie amoureuse et que le chien feront partie des sauvés, politiquement correct hollywoodien oblige ; quand on a des enfants, ados ou animaux de compagnie dans ce genre de film, ils sont toujours, forcément, en vie à la fin, même s'il ne reste plus qu'eux) tout en risquant fortement de se geler les poils de la bite au passage, mais on est quand même pris par le film, qui déroule ses 125 minutes (générique de fin compris) sans temps morts. Sans pathos inutile non plus, mis à part l'histoire, secondaire, de ce petit garçon atteint de cancer, hospitalisé, ne pouvant être déplacé sans ambulance, et qui reste, seul, avec une médecin (qui s'avère être la mère de Sam et, donc, ex-femme de Jack, jouée par Sela Ward), espérant qu'une bonne âme viendra les sauver. Politiquement correct oblige, vous vous imaginez bien qu'ils ne vont pas défunter seuls dans l'hosto désert et frigorifié, ça ramène à ce que je viens de dire plus haut dans ce même paragraphe d'anthologie (ah ah). En revanche, les trois scientifiques coincés dans leur station météo écossaise (dont Ian Holm) ne s'en sortiront pas, et leur fin est montrée avec pas mal de pudeur, ce qui est assez rare pour être signalé. Dans l'ensemble, le film n'est pas un chef d'oeuvre, mais c'est un excellent film catastrophe, un de mes préférés du genre, oui, vraiment, et je pense vraiment qu'il s'agit, avec Independence Day (plus SF que catastrophe...disons un peu des deux), du meilleur film de Roland Emmerich. C'est vrai que comparé à 2012, Independence Day : Resurgence, 10 000 ou Godzilla, sans oublier White House Down, c'est largement supérieur en terme de qualité. Mais même en le comparant aux autres classiques du genre (La Tour Infernale, L'Aventure Du Poséidon premier du nom, qui restent indéniablement les jalons du genre, Armageddon), Le Jour D'Après n'a absolument pas à rougir. C'est du bon, du très bon grand spectacle. 

Posté par ClashDoherty à 09:45 - - Permalien [#]
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